Accepter et renoncer

La cause de la plupart des conflits internes ou externes pourrait se résumer dans une phrase simple, accepter ou renoncer à avoir raison. La paix se situe peut-être au dessus de cette forme en croix, au dessus du chiasme. Le fait de renoncer à devoir coûte que coûte avoir raison à ses propres yeux comme aux yeux des autres demande à passer par le chas d’une aiguille et louvoyant agilement entre Charybde et Scylla, le doute et la certitude. Il est facile de confondre le fait de renoncer à avoir raison avec l’échec, avec la lâcheté, avec une compromission que nous avons toujours tenté de tenir à distance, à seule fin de maintenir notre identité, notre intégrité. Mais quelle serait alors cette identité, cette intégrité si celle ci est fondée sur un vecteur illusoire ? Cette obsession d’avoir raison à tout prix nous entraîne à nous heurter sans relâche à tout ce qui nous entoure dans le seul but de conserver l’illusion d’un point fixe. Depuis Héraclite nous savons pourtant que l’homme ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. On peut imaginer que c’est parce que l’eau coule que le fleuve n’est jamais le même mais cela vaut aussi pour le sang charrié dans nos artères, pour les pensées qui ne cessent jamais de nous traverser, pour les émotions également. Comme peut on imaginer être un point fixe autour duquel tournerait toute chose, même Dieu y aura renoncé puisqu’on dit souvent qu’Il est désormais en toute chose. On pourrait remplacer le mot « Dieu » par « tout » ou « rien » cela n’aurait pas plus, ni moins de sens.

Illustration  » Fruits  » peints par Séraphine de Senlis détail

Musée de Grenoble.