La déception vient souvent en premier lorsque je relis mes textes. C’est probablement la raison principale pour laquelle je ne relis guère. Presque aussitôt je me permets un jugement. Pas suffisamment ceci, pas suffisamment cela, ou plutôt trop de ceci, trop de cela. Mais c’est idiot. Car dans le fond est-ce celui qui lit qui écrit ces textes ?
Le risque alors est de mélanger ces deux entités, de n’en fabriquer qu’une seule, le fameux moi.
Et ce moi évidemment déteste tout la plupart du temps, lorsqu’il ne s’y reconnait pas surtout.
Pourquoi détester autant tout ce que je peux faire ? Comme si ce qui était fait venait du monde. Il y a surement quelque chose de pathologique dans cette affaire. Du manque ou du trop plein, je ne sais pas vraiment. En tous les cas, la mesure n’y est pas.
Et c’est bien là le nœud de nombreuses difficultés que cette mesure.
De la mesure pour écrire et de la mesure pour se relire.
Exactement comme pour peindre.
Sauf que ça ne fonctionne pas tout à fait comme ça.
Il faut que cela soit démesuré dans un premier temps , chaotique, brouillon, sauvage. Puis attendre que tout cela s’apaise. Passer par un laps de temps. Une antichambre ou une espèce de purgatoire. S’enfouir dans l’ aveuglement pour parvenir à voir.
Il n’est pas question de s’aimer ou pas dans cette affaire. Cela n’a rien à voir.
C’est plutôt une question de lieu et de temps. Un espace temps.
Depuis quel lieu puis-je rendre compte de ce qui s’est produit sur la toile ou sur la page blanche.
Depuis quel lieu observer le résultat sans qu’aucune émotion ne vienne déranger la surface.
Aucune émotion de surface plus précisément. De ces émotions faciles, instinctives que le je projette comme des nuages d’encre pour ne pas être vu surtout dans la nudité qu’il abhorre.
La plupart du temps je retourne les toiles contre le mur, j’accumule ainsi sans y penser. Et sur ce blog je fais la même chose, les textes sont recouverts par d’autres textes sans que je n’envisage trop de retourner les lire.
Sauf ces derniers temps car j’ai découvert que l’on pouvait republier un texte les jours de fatigue, les jours où rien ne vient, les jours où on n’a pas d’envie particulière sauf celle, peut-être, de marquer une présence.
D’ailleurs ne faut-il pas se méfier aussi de cette envie là ? Celle de vouloir marquer une présence ? Pour qui ? pour quoi ?
Trop de questions encore jeune padawan.
Si tu es honnête avec toi-même tu connais déjà la plupart des réponses.
Ce dont tu parles, réfléchis bien. Est-ce qu’un pommier se met à fabriquer des poires comme ça ?
Mais sais-tu quel arbre tu es ? C’est peut-être cette question qu’il faudrait te poser avant toutes les autres.
Mais je ne suis pas un arbre, voilà le petit drame. Que dire d’autre ?
Peut-être qu’avant de « bien dire » les choses comme tu t’obstines tellement à vouloir le faire, il s’agit de les dire simplement, telles qu’elles sont, sans fioriture, de façon brute. Les dire et les redire jusqu’à ce qu’elles te soient claires, évidentes.
Et pour ça, toute l’évidence est à traverser, la tienne, celle en laquelle tu crois.

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