
— Bienvenue dans cette formation sur le storytelling ! Fermez la porte et la fenêtre s’il vous plait, tout ce que j’ai à vous confier doit rester secret vous savez bien que par les temps qui courent les murs ont des oreilles.
Un léger frémissement dans la salle. Une sorte de petite houle, quelques gloussements de contentement. Je m’étais installé près de ce gros type chauve qui suait déjà à grosses gouttes. Il m’avait tendu la main et je ne l’avais pas prise. J’ai la phobie des microbes. Tant pis si ça offusque quiconque si je ne serre pas les mains, je m’en fous. C’est à prendre ou à laisser comme on dit.
L’odeur de pieds venait de lui. Du coup je me suis même déplacé de quelques chaises pour me retrouver à coté d’une jolie brune la cinquantaine bien tapée. Mais là aussi, l’odeur était à gerber. Un parfum trop lourd, trop musqué. Une femelle ragondin, à la recherche d’un blaireau visiblement. Jamais vu quelqu’un papillonner des faux cils comme ça.
Puis j’ai regardé l’animateur. Un animateur comme les autres j’ai pensé. C’est fou comme toutes ces personnes se ressemblent désormais. On dirait que quelque part il existe une sorte de fabrique de pantins que l’on peinturlure en rose, dans le visage desquels on plante un regard bleu, et dont il ne se dégage absolument aucune odeur. Mais ils sont aussi dotés d’entrain, de persuasion, de charisme pour utiliser un mot à la mode.
— Comment se distinguer des autres marques, comment faire pour que l’on retienne VOTRE marque ? Ce ne sont plus désormais la qualité des produits, tout le monde ou à peu près fait construire en chine. Non ce qui va aider le prospect à devenir votre client : c’est comment vous allez enrober tout ça, comment vous allez lui servir une belle histoire, qui réveillera en lui une dose suffisante d’empathie pour se ruer sur vos produits dans les rayons. Et moi bien sur je vais vous apprendre à créer cette histoire, à l’issue de ce stage vous aurez les premiers rudiments pour pouvoir parler du storytelling sans dire trop de bêtises.
Je réfléchissais à la dernier phrase » sans dire trop de bêtises. » et elle m’avait fait tiquer. N’était ce pas le genre de phrase qui ne sert qu’à ferrer le poisson ?
Ainsi la première leçon était sans doute celle-ci : vous pouvez dire à une assemblée autant de conneries qu’il vous passe par la cervelle, à un moment donné vous n’avez qu’à donner le désir à l’autre de ne plus raconter d’idiotie pour que toutes les vôtres passent à l’as comme par magie.
Ce stage commençait bien, comme sur des roulettes, j’essayais déjà de me souvenir d’un restaurant dans les parages, ou tout au moins une boulangerie. Bref au bout de quelques minutes ne me souvenant d’aucune enseigne, je décidais de me lever et de partir encore une fois de plus. Ce n’était déjà pas de la tarte d’assister à ce genre de connerie, si en plus il fallait se priver de déjeuner…
Je venais de passer la cinquantaine et je m’étais juré de m’entrainer un petit peu tous les jours à dire non. C’était jouissif. Je me demande aujourd’hui si à cause de l’euphorie je n’abusais pas un peu.
—Tant pis pour le storytelling j’ai dit, bonne journée à tous, j’ai piscine.
Ben, décidément, tu ne restes jamais plus de cinq minutes à tes réunions ! Dommage… y’avait pas Brigitte, cette fois !
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Je teste le comique de répétition
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Se tirer du monde des cons est un devoir et un salut
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Surtout qu’un con peut en cacher un autre et que c’est sans fin
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