#Les 40 jours | Prologue ( reprise )

Un défi de quarante jours lancé par François Bon dans l’un de ses ateliers d’écriture. Le premier en guise de mise en jambe, de prologue… une image et un texte une idée inspirée par un livre de photographies de Taryn Simon

Il s’agit de parler de lieux, d’objets, de trouver une singularité, une fissure dans le familier ou le réel, un texte et une image les deux séparés par un signe de ponctuation (:) de créer un contraste une bizarrerie textuelle.

1.

Tout ce que je sais de la maison est qu’elle date de 1850, qu’elle est un bricolage de deux petites maisons autrefois accolées l’une à l’autre, qu’une vieille dame y est morte, probablement dans la chambre au rez de chaussée. Il règne d’ailleurs toujours une odeur étrange dans cette chambre, malgré tous les efforts fournis pour repeindre le plafond, les murs, poncer le plancher, c’est comme si elle continuait à vivre ici d’une certaine façon avec nous. Il paraîtrait aussi, d’après les héritières de cette vieille dame, qu’elle y a caché un trésor, qu’hélas nous n’avons pas trouvé. Parfois nous espérons le découvrir en cassant une cloison, en explorant la cave, en grimpant au grenier pour vérifier la toiture. Ça fait huit ans que nous habitons la maison et nous cherchons toujours plus ou moins un trésor caché, c’est ce qui s’appelle avoir de la suite dans la rêverie. Il y a une cour et de l’autre côté de celle-ci mon atelier. Il fait partie du lot. Autrefois il était inclus dans un bâtiment beaucoup plus vaste qui devait être à l’origine une écurie puis une scierie. Certains matins d’automne des odeurs de chevaux sortent des vieux murs de mâchefer malgré l’isolation que j’ai mise en place, une bonne épaisseur de laine de verre et des plaques de placo. Parfois aussi à la même époque curieusement une odeur que je reconnais entre toutes, celle que j’associe à mon père. Nous avons du débarrasser la maison de celui-ci il y a désormais plus de sept ans et chaque année, même encore aujourd’hui, cette odeur ressurgit. Sans doute depuis l’étage au dessus de l’atelier ou j’ai entreposé bon nombre de ses affaires, vêtements, livres, meubles, dont je ne parviens pas à me débarrasser. Ce qui fait qu’en fait notre maison est constituée de plusieurs maisons, au moins trois si je compte. Et même beaucoup plus car parmi ces affaires que je ne résous pas à lâcher, il y a aussi des souvenirs des grands parents, par contre pas d’odeur de ce côté là. On ne sait pas grand chose de cette maison à part ce genre de choses, un mélange singulier de familier qui n’en n’est pas tant que ça lorsqu’on s’y arrête et qu’on y découvre un tas de choses dissimulées. On ne sait rien des vies des gens d’ici avant nous, ni pas grand chose non plus de ceux que l’on croit avoir connus:

Cette maison et le lot sur lequel elle est sise, dépendances comprises nous a coûté 138 000 euros frais de notaire compris et l’argent qui nous a servi à l’acheter provient de ma part d’héritage suite à la vente de la maison de mon père. Il faut que je fasse une liste des artisans qui y sont intervenus, plombier, électriciens, etc, ne serait ce que pour avoir une trace quelque part, me rappeler les dates d’interventions, le prix des choses, tout ce que ça nous aura couté. Si on ne se souvient pas de ça on ne se souvient de pas grand chose.

2.

J’ai chargé l’application Google Earth sur mon IPad et j’ai tapé plusieurs adresses successivement le 5 place de la Bastille à Paris, puis juste après, la gare de San Sebastián, et ensuite j’ai cherché à revoir la maison de mon enfance au 20 avenue Charles Venuat à la Grave, près de Vallon en Sully. Un voyage éclair qui m’a brassé car ça m’a fait revivre pas mal d’émotions à l’accéléré. Quel rapport entre ces trois lieux sinon une sensation d’étouffement , une solitude épaisse, gluante même lorsque je me souviens de cette nuit blanche passée à attendre le train du matin pour le Portugal. L’arrachement aussi de ce pays de l’enfance, l’incompréhension de deux êtres dans une vie de couple :

Google Earth est un logiciel crée par Google qui permet de visualiser n’importe quel endroit sur la terre, deux options découvertes aujourd’hui, survoler les lieux puis on peut cliquer sur le petit bonhomme noir et suivre les lignes bleues pour voir le lieu choisi, à hauteur d’homme.

3.

J’ai du mettre une semaine pour restaurer ce mur, en hiver de cette année là, 99 sur le terrain de cette amie que je ne vois plus. Il s’était éboulé comme de nombreux autres restanques des environs suite à des pluies torrentielles. Bien que je ne sois pas bricoleur je me suis senti obligé pour je ne sais plus quelle raison. Sans doute parce que cette amie m’offrait le gîte et le couvert et que je n’avais alors pas un fifrelin. C’est intéressant de refaire un mur, au moins autant qu’un puzzle, si on aime. Et souvent on pense ne pas aimer une chose parce qu’on ne la connaît pas. Donc ce n’était pas bien sorcier, des petits cailloux des moyens et des gros et de l’astuce à trouver pour faire tenir tout ça sans ciment, juste en faisant couler du sable, de la terre entre les pierres pour créer quelque chose de durable et d’homogène. Cela m’a pris une bonne semaine, en y travaillant quelques heures la journée. Il y a de ça deux ou trois ans je me suis rendu à Moissac, pas loin de la maison de cette amie, j’ai même été tenté de m’y rendre pour voir si le restanque avait tenu bon, et puis je me suis souvenu d’un tas de choses qui restaient en jachère entre nous et je n’ai eu ni l’envie ni le courage de m’y rendre. Je crois que c’est le seul mur que j’ai construit de toute ma vie de cette façon, en prenant le temps pour bien caler les choses afin qu’elles ne bougent plus:

L’origine du mot restanque provient du provençal restanco, on peut aussi parler d’un mur de retenue. Il sert généralement à barrer le lit d’un torrent intermittent pour provoquer un atterrissement et créer ainsi une terrasse de culture.


Se relire quelques mois plus tard et comprendre que l’on est passé à côté de la proposition. Souvent parce qu’on complique trop.

Le doute s’installe. Mais ça va vite 40 jours, écrire chaque jour durant 40 jours. Difficile de trouver le temps pour se relire.

C’est donc en février 2023 que je prends le temps. Refaire tous les exercices ? non, sans doute pas. Mais relire les propositions de départ oui. Mesurer l’écart si possible.

Une phrase par exemple qui m’aura échappée et que je découvre aujourd’hui

« Notre intérêt est à la limite dangereuse des choses »

(du poète Robert Browning.)

Ainsi dans cette seule phrase il est possible de découvrir l’intention de la proposition du jour, ce prologue. Ce ne sont pas les choses en elles-mêmes l’important mais comment elles s’assemblent ou se séparent, comment en s’assemblant ou se séparant elles nous invitent à inventer leurs « limites » autant que leurs « contours ».

Ainsi prendre une image et l’associer à un texte, une légende n’est pas un acte innocent. C’est la remise en scène de ces deux notions de limite et de contour.

Ensuite que l’intérêt s’éveille à la limite dangereuse des choses, dangereuse car à cet instant la certitude nous manque. Soudain un doute s’installe.

Ce qui est soulevé dans cette proposition c’est un monde. Cette phrase apparait comme un bon levier pour nous y aider.

Notamment en tant que peintre lorsque je publie des images de mes peintures sur internet, je ne me soucie assez peu de la légende de celles-ci. Parfois un titre, les dimensions, la technique. Je ne m’étends pas en légende sous ces images.

Le piège dans lequel je suis tombé comme un bleu c’est le récit.

En fait ce n’est pas à moi de raconter en toutes lettres, mais au lecteur de se raconter quelque chose à partir de ces deux blocs Image- légende. C’est ce que je comprends de cet espace entre ces deux objets qui est le lieu d’un récit qui sera multiple, aussi multiple qu’il y aura de lecteurs.

Pourtant il faut bien que j’ai une intention de départ pour choisir ces deux blocs. Il faut bien que je me raconte sans doute ma petite histoire aussi. Sauf que je ne la raconte pas en l’écrivant. Je place deux blocs et cette limite floue entre les deux puis je m’écarte.

CII HONEYWELL BULL Bobigny

Le centre de Bobigny n’a un rôle industriel que par son activité de reconstruction de machines; son activité a essentiellement été transférée sur Angers.

Par convention signée en 1996 entre Bull, le Ministère de la Culture et de la Communication et le Conseil Général de la Seine-Saint-Denis, les archives historiques de Bull sont conservées aux Archives Départementales de la Seine-Saint-Denis et sont accessibles aux chercheurs sur rendez-vous avec le centre archives Bull : srv.archives-lv@bull.net.
Les Archives Départementales sont ouvertes du lundi au vendredi de 9h00 à 17h00 et samedi matin de 9h00 à 12h00.

Le groupe Bull trouve ses racines en Norvège en 1919, date à laquelle Fredrik Rosing Bull construit la première machine à statistique européenne.
Après sa mort prématurée en 1925, ses brevets sont achetés par l’entreprise suisse H. W. Egli, qui s’installera en 1931 à Paris sous le nom de H. W. Egli-Bull avant de devenir en 1933 la Compagnie des Machines Bull.
La « Bull » va connaître une croissance constante et remporter au cours des années 50 quelques beaux succès techniques et commerciaux face à son concurrent majeur IBM. A la fin de cette période, le passage définitif de la mécanographie à l’informatique entraîne les entreprises à investir toujours plus…( extrait d’un article trouvé sur le site Cairn

autre source Ouest-FranceModifié le 27/05/2014 à 08h58Publié le 27/05/2014 à 00h00

Lundi, le groupe français de service informatique Atos a lancé une OPA amicale sur Bull, ex-champion bleu-blanc-rouge du secteur. Que vient-il chercher chez ce pionnier installé notamment à Angers ? Sa connaissance en cybersécurité et traitement d’informations en masse. Une nouvelle page de l’histoire – mouvementée – de Bull…

Intention de départ ?

Pourquoi cette image et ce texte, parce que ce matin ( février 2023 quand je relis cette proposition, juste avant j’ai écris un texte à propos d’ un quai de déchargement, il me venait clairement à l’esprit des images d’un de ces jobs effectués dans les années 80, chez Bull à Bobigny.

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