Revenir encore une fois à la notion de série, mais cette fois une série qui ne serait pas un alignement de tableaux sans explication sur un mur une série de tableaux sur un mur dont la nécessité première est d’être exhibée comme une série de crottes que le gamin montre à sa maman pour lui faire un cadeau crée ou renforcer un lien non une série pour l’invisible comme il t’arrive de le faire sans toujours tenir la distance parce que tu hésites, tu atermoies, tu doutes parce que la fragilité la vulnérabilité de cette installation mentale n’est qu’une installation mentale et rien d’autre. Dans le fond, presque au fond du trou acculé tu te rends compte que l’exercice intellectuel n’est rien d’autre encore qu’une sorte de caca que tu essaies d’offrir à quelque chose à quelqu’un pour être vu, pour exister ou tenter d’exister.
Mais lorsque tu le fais avec le silence l’invisible sans que personne ne le sache il y a tout de même une petite satisfaction. Une satisfaction d’arpenteur. Chaque jour tu as la sensation de te rapprocher de quelque chose dont que tu serais bien en peine de définir soit par des mots soit par des couleurs. tu te rapproches mais les mots les couleurs te manquent tu as la sensation qu’elles ne sont qu’un prétexte et pourtant il n’y a que ça à ta disposition.
Evidemment il y a des traces de l’arpentage, les petits dessins sur un coin de table, ces mots que tu jettes chaque matin sur ton traitement de texte en n’oubliant pas d’appuyer sur le bouton publier. C’est une fausse publication si tu réfléchis un peu c’est une façon de non publier en publiant tout de même. Mais passons sur les détails, essaie de revenir à ces tous premiers moments où la notion de série s’est faite évidence, une évidence dans le sens de rituel un rituel que tu as installé dans la ville, dans les transports en commun parce que tu voulais échapper à quelque chose à un danger certainement à l’idée que tu te faisais déjà du danger et quel danger sinon celui de mourir. C’est cette peur de mourir qui te fait te raccrocher à ces rituels depuis toujours, et peut-être que ce n’est pas uniquement pour amadouer la mort ou l’invisible mais pour tenter de créer un dialogue avec ce qui n’est pas sensé parler ce qui n’est pas sensé répondre ce qui n’a pas besoin de la parole de la couleur, de la forme de la ligne et des mots pour exister. Le mot être vient spontanément mais il n’est qu’un mot et la question alors est la suivante est ce le mot qui est l’être ou bien l’être qui se dissimule derrière les mots derrière toute chose.
Est-ce vraiment ce moteur le danger la peur de mourir la peur de disparaitre la peur de voir le monde s’évanouir est-ce un bon moteur un moteur qui te permet de respirer de prendre de l’altitude de voler de sentir l’air sur ta joue de retrouver une souplesse pour ce vieux corps est-ce le bon moteur tu te poses encore cette question alors que tu sais déjà la réponse toutes les réponses possibles à cette question et tu continues encore de te la poser le rituel de la question est aussi essentiel que tout le reste.
Et si c’était par amour de toutes façons c’est toujours par amour tu en as toujours eu l’intuition mais si fort que le monde a du te forcer à en douter il fallait donc que tu en doutes pour démonter petit à petit au travers de rituels invisibles au yeux des autres le doute comme ce que tu appelles l’intuition et qui n’est rien d’autre que l’expérience de vivre, l’expérience d’être là au monde.
voilà aussi une vieille question qui est irrémédiablement liée à la première l’amour la mort l’âme est au centre l’âme un mot tellement désuet mais en a t’on un meilleur
des réponses il y en a pléthore on passerait une vie à tenter de les inventorier jour après jour instant après instant mais on reviendrait toujours à ces deux questions essentielles
Veux tu faire quelque chose par peur ou par amour ?
ce qui est encore une question qui t’oblige à marcher dans la ville en effectuant comme tout le monde un pas après l’autre.
des actes des pas dans l’espace et dans le temps mais quels actes ?
Et puis aussi on ne peut échapper totalement au monde au temps à Monet à Atget par exemple à l’impact qu’ils ont eu par la suite sur la notion de rituel de série entre autres.
ce qui t’agace souvent c’est d’avoir à te servir de référence, tu ne les cites que rarement la raison véritable qu’elle est t’elle tu ne veux pas appartenir à cette élite loin du peuple à ce groupe qui ne cesse de se rassurer du matin au soir en se gavant de références comme pour ne pas se perdre de vue c’est là où ça ne va pas très bien chez toi c’ est là où l’amour manque ou ne tient pas ne tient plus et c’est la rage qui remonte et avec elle la peur d’une mort mais pas la tienne enfin pas que la tienne mais celle de tout un peuple invisible ce peuple que tu ne cesses de rencontrer chaque jour dans la ville et dans la campagne ce peuple ce sont les gens comme toi et moi à des années lumière des préoccupations souvent nombrilistes de cette élite
Il y a un grand plaisir désormais à déclarer je ne sais pas à oser le dire tout du moins. et ce faisant c’est l’ensemble de ce rapport à la référence que tu ruines silencieusement en toi-même et en tant qu’arpenteur on peut en éprouver comme une joie sauvage, dionysiaque.