
Le trou possède t’il une fin, que nous engloutissions, bouffions, dévorions tant et tant jusqu’à l’écœurement et malgré cela restions insatisfaits. Dans cette glissade du désir, la panique de rater une occasion, le vertige que ce mouvement de soi crée, voire provoque, l’idée de la faim se confond avec celle de la fin phonétiquement. L’appétit est probablement le mot inventé à cet escient, pour pointer un possible distinguo. Tant qu’on n’évoque pas la mort distinctement c’est ainsi. Son absence linguistique crée un trou noir qui aspire presque tout ce qui se tient à sa périphérie. Bouffons pour contrer l’indicible. Défense dérisoire. Bouffons pour ne pas voir, ne rien entendre, et tout ce qui peut nous glisser des mains, intangible d’un sein pâle, d’une bouche vermeille, d’une cuisse à la douceur de satin. Bouffons pour avaler tout rond toutes ces amertumes, ces déceptions, ces attentes intolérables insupportables. Bouffons et chions surtout des montagnes de merde, un Himalaya, un Everest concrétions irrespirables de nos désirs toujours insatisfaits. Puis mourrons, assistons hébétés au divers fins du monde, laissons nous emporter. Nous sommes tellement certains de revenir, de tout recommencer encore et encore dans l’infini d’un temps fantasmé, temps des horloges des banques et des usines. Bouffons et chions, pour bien montrer l’indignation de vivre ainsi sans autre choix le pense-t’on.
Se nourrir quand tu découvres la patience comme résistance. La frugalité comme haut-fait chevaleresque. Mots à vivre au beau milieu du dérisoire.
