
Et bien les voyages non plus. Ils ne me font plus grand chose. Que ce soit ici ou là, aucune différence. Même le dépaysement, illusion, vue de l’esprit. On voyage et on se raconte, soit-disant, de nouvelles histoires, mais ce sont toujours les mêmes, maquillées de ciel bleu et d’embruns. Seuls vecteurs, les mots, le nom des lieux, la langue ou l’alphabet, d’un désir d’exotisme qui courre encore comme un canard sans tête, tombe et rebondit à plat, justement. Peut-être le voit-on mieux retomber qu’on n’avait pas envoyé bien haut. Et qu’on en souffre bien moins qu’on en espérait peu, voire rien. Individuellement, c’est ainsi. Mais quelle honte, si je pointe cet état d’esprit avec le regard du collectif. Tu n’es jamais content de rien, tu n’es qu’un emmerdeur, tu devrais te réjouir. Il suffit d’être deux pour que le collectif se forme et prenne ce genre de petit ton. Ce n’est pas tout noir, ni tout blanc. Ici , il fait moins chaud, il y a du vent, et de l’ouzo. Depuis le départ de Lyon impossible d’avaler une bouchée de viande. Si les comptes sont justes, c’est la quatrième salade grecque, accompagnée d’un peu de tzatziki. Pas faim. Pas envie non plus de consommer pour compenser, ou pour remplir quoique ce soit. L’affrontement nécessite autre chose que de simples expédients. Tu nous emmerdes, reprend le collectif en chœur. Profite, jouis, oublie. Et tais-toi, par pitié, ne dis plus rien.
Que veut dire se réjouir d’un voyage? Pourquoi cet engouement pour l’ailleurs? Certains quittent une plage quotidienne pour une autre. La peur sans doute de ne pouvoir dire « j’ai bougé pendant les vacances ». C’est très curieux ce besoin de fuir, de s’évader disent certains, pour montrer qu’on voyage pour les vacances. Comme si les deux mots étaient indissociables. Comme si rester chez soi, prendre le temps de vivre, rêvasser sur son canapé était une offense à l’esprit des vacances. Je n’ai toujours pas compris comment ceux qui se gaussent de participer à la sauvegarde de l’environnement, à leur propre empreinte carbone, ne soient pas plus actifs dans leurs actes que dans leurs paroles. Les prises de conscience bienveillantes liées au confinement sont je crois enfouies aux oubliettes.
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