Passer d’un événement à un autre, ne rester collé à aucun. Hier, sur la route que j’emprunte pour rejoindre les cours, j’ai songé à un moment m’enregistrer et puis j’ai laissé tombé. L’intention me paraissait trouble encore une fois. Mais je me suis mis à lire à voix haute tous les textes des pancartes que mon regard apercevait sur le bord de la route, ceux que je parvenais à lire en passant à hauteur des zones industrielles ou commerciales, les sigles au cul des camions, les plaques d’immatriculation, toute écrit perceptible, au moins durant le laps de temps nécessaire pour atteindre le pont de Vernaison. Une quinzaine de minutes environ. Exactement le même effet que de lire à haute voix un poème. Stupéfiant. Un état proche de la transe, une sensation étonnante de bien-être à la clef. Comme quoi le sens n’a que peu d’importance que ce soit dans la récitation, dans la prière, dans l’énoncé de plaques minéralogiques. L’intention qui se loge en amont, scellée à notre compréhension, seule compte. Et, sans doute que tout ce que nous pouvons faire est de nous y fier aveuglement sans discuter. Passer ainsi le temps, la vie, dans cette obstination têtue quoiqu’il puisse advenir pour tenter de nous en détourner. Rester face au doute un bref instant, puis passer, passer encore.