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Le mieux serait de réunir les deux mais c’est rarement ça. Trop habile c’est mort, trop vivant ça fait mal aux yeux…alors une fois encore la voie serait-elle celle du milieu?
Tu te souviens d’une époque lointaine où tu t’étais déjà posé une question similaire concernant la photographie.
A l’époque le “piqué” comptait plus que la photo elle même… et le petit cadre noir qui préoccupait tant les puristes ; ceux ci limaient avec frénésie le passe-vue de leur agrandisseur afin de prouver au monde entier qu’ils n’avaient pas recadré leurs clichés…
Mais dans le fond c’est bien la photo qui compte comme le tableau en peinture … Ce que ressent le spectateur n’a pas grand chose à voir avec les recettes utilisées.
L’habileté est préoccupante car elle semble prendre le pas sur la vie. J’ai beau ouvrir mon esprit et mes yeux, mon cœur , l’habileté sans âme me chaut peu.
Une âme mise à nue aussi me procure un haut le cœur si la sensiblerie l’emporte sur la sensibilité.
Trouver l’équilibre entre les deux peut-être .. encore que ce n’est pas sur: on risque de tomber sur du tiède.
Les asiatiques, doués d’une patience infinie sont capables de répéter un trait des milliers de fois avant de sentir que ce trait enfin est juste. Un entrainement sur le long terme est alors accepté et c’est en se pressant lentement qu’ils cheminent dans la pratique et acceptent d’atteindre à la maîtrise à un age avancé.
En occident nous sommes pressés, j’ai connu un élève de 70 ans qui était venu me voir pour apprendre à dessiner , et il voulait atteindre à la maîtrise en seulement une année …
Il aurait pu. L’expérience de la vie lui aurait servi d’ accélérateur. Encore faut il se libérer du connu comme de la comparaison.
L’habileté en dessin et peinture ce ne peut être un art de la copie à terme, mais plutôt l’acceptation de qui nous sommes pleinement sans entrave, sans peur. La fameuse peur du ratage vous savez …l’habileté ce n’est pas dessiner comme Leonard de Vinci mais comme tu es.
Quand l’habileté épouse la vie, que la vie épouse l’habileté et qu’on en reste baba alors on peut dire qu’il se passe quelque chose du domaine de l’art, du sacré etc. Mais si on ne dit rien c’est très bien aussi : les grandes joies aussi sont silencieuses.