Carnet 13

2h23. Arrêter une image. la force d’une image c’est sa durée.

Année 1735, 2h24. Une image arrive, puis s’immobilise par l’écriture.

De petits points mobiles mouchetaient le ciel, sorte de graphie en mouvement qui peu à peu se rapprochait. C’était des oiseaux et parvenus à notre aplomb ils se mirent à tournoyer au dessus de la goélette. Appuyé contre le bastingage, le capitaine plissait les yeux à la recherche de signes sans doute encore plus précis mais la brume devant nous encore épaisse, flottait toujours sur l’océan. Peut-être une île me dit-il comme s’il se parlait à lui-même. Enfin le vent se leva et déshabilla l’horizon pour faire apparaître une terre. Elle n’était qu’une masse sombre qui s’étendait au jugé sur a peine quelques kilomètres seulement. C’était effectivement une île, une petite île. Mais comme nous naviguions depuis des jours déjà, sa petitesse ne gêna en rien la joie de la distinguer. enfin une terre. Et nos espoirs de faire le plein d’eau et de vivres se ravivèrent comme un foyer presque éteint sur lequel on place une bûche neuve. Parvenus à quelques encablures de cette terre inconnue nous vîmes qu’elle était bornée de hautes falaises, qu’aucune plage hospitalière ne nous permettrait d’aborder l’île sans encombre. Le capitaine décida de contourner cette difficulté, premier aspect peu engageant de l’île, mais au bout de quelques heures ne trouvant aucune possibilité d’envoyer une chaloupe, je vis ses épaules retomber, son corps se fléchir légèrement ce qui était un spectacle aussi insolite que celui qu’offrait cette terre impraticable. Qui après s’être laissée découvrir au loin se refusait. Enfin, à force d’obstination nous découvrîmes une sorte de lagune mais dont la dangerosité n’était pas moindre que les hautes falaises. Des centaines de récifs pointaient à sa surface et tout au bout on pouvait distinguer une étroite plage. Il fut décidé de jeter l’ancre à bonne distance pour ne pas endommager le navire puis une chaloupe avec quatre hommes montèrent sur l’embarcation fragile. Des vagues brèves mais violentes semblaient surgir de toutes part et c’est le capitaine lui-même qui s’était mis à la manœuvre aidé par un homme d’équipage qui aurait pu être mon grand-père. Cependant que ce dernier disposait de réflexes et d’une habilite inattendue chez un vieillard. Aussi après encore une bonne demie heure d’efforts nous arrivâmes enfin à la côte. Depuis la petite plage constituée pour l’essentiel de rochers et de cailloux nous aperçûmes un sillon qui gravissait la pente menant vers les hauteurs et nous décidâmes de nous y engager. Le sol était boueux et glissant comme s’il venait de pleuvoir à verse. Pourtant au dessus de nous le brouillard s’était dissout complètement laissant place au ciel d’un bleu profond.

Le capitaine fronça les sourcils. Puis il extirpa un objet étrange que je reconnu être un de ces sextant, une toute nouvelle invention fort utile pour la navigation maritime. Il y avait désormais plusieurs jours que nous avions quitté Varadero, et l’île de Cuba pour rejoindre Key west dans l’archipel des Exumas et jusqu’ici jamais à ma connaissance il n’avait eu besoin d’utiliser cet objet.

Il aligna le sextant sur l’horizon à l’aide d’une sorte de lunette au travers un miroir transparent et fixe puis je le vis manipuler l’alidade pour faire pivoter le miroir principal et viser le soleil. Enfin quelques secondes lui suffirent pour ramener le reflet de celui-ci sur l’horizon par un procédé nommé “double reflexion”. il ne restait plus qu’à mesurer l’angle sur le limbe. Puis il resta silencieux et personne n’osa rompre ce silence. Cependant que tous attendions son verdict. Il était evident que nous avions dérivé hors de notre cap premier ce qui n’était une surprise pour personne étant donné les grains phénoménaux que nous avions rencontrés. Pendant que nous restions silencieux je regardais tout autour de nous. L’île n’était plantée d’aucun arbre, d’aucune végétation, les oiseaux eux-mêmes avaient disparu. Je me penchais sur le sol pour l’examiner de plus près et je j’aperçus pas le moindre insecte, pas là plus petite trace de mousse ou des lichen. C’était une île déserte absolument, une île qui probablement venait de surgir du fin fond de l’océan ce qui expliquait son absence totale d’habitants. Sans doute le capitaine était-il parvenu à la même conclusion car il dit soudain tout haut que nous allions nous retrouver à cour d’eau potable. Il paraissait en effet improbable d’en trouver sur l’île. Aussi loin que portait notre regard nous ne vîmes que des rochers sombres une étendue luisante et inquiétante malgré la lumière du jour faisant reluire sa surface.

4h16 aujourd’hui. “Produire du réel” à partir d’un billet de Thierry Crouzet lisant Aurélien Barrau. Perso pas bien fan d’Aurélien Barrau non plus. Mais produire du réel, quel type d’action est-ce que je peux mettre en place pour y parvenir. Et de quel réel s’agit-il. Un réel que je désirerais autre qu’il est actuellement. Pas le mien uniquement. Comment agir pour impacter le réel. Est-ce que nous ne faisons pas cela tous les jours. Sauf que nous le faisons peut-être avec des intentions insufisamment réfléchies.

18h05. Une image qui se dérobe plus on s’en approche

Huile sur toile 40×50

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