
De quoi a-t’on peur vraiment sinon de perdre quelque chose que l’on considère important. Et si on se demande soudain ce qui est important vraiment, à part vivre, pas grand chose ne se place sur le même plan. Les gens qui disent: « je ne pourrais pas vivre sans une telle un tel, sans ceci ou cela » — ne l’ont pas expérimenté sinon ils ne seraient plus là pour en parler. Ils ne perdraient pas de temps à parler pour ne rien dire. Toujours s’ attendre à ce que tout disparaisse. Le conserver dans un coin de la tête et, en attendant, faire comme on peut pour sourire comme un idiot à toutes les promesses entendues. Rester ainsi « sociable » Ce que l’on possède ou ne possède pas. Mais a-t’on jamais possédé quoique ce soit ou qui que soit. C’est dans les rêves du matin que je peux le mieux voir toute l’illusion d’une vie. Quelques lueurs passent dans la pénombre, vaguement identifiables comme personnes, mais le plus souvent ce sont plus des caractères que des âmes. Et ces caractères ne sont constitués que de leurs non-dits en tant que personnes approchées. La durée de la vie si illusoire aussi dans ces moments étranges où il est possible enfin de percevoir tout ce qui se dissimule sous l’agitation. Chercher la sécurité autant que la détester. Paradoxe qui se résoudra aussi contre toute attente dans ces rêves du matin quand on saisit que l’on n’a pas besoin de ce mot. Une grande douceur, tendresse ? Et qui nous enlace du seul fait de la comprendre. Une sensation de douceur et de tendresse qui vaut tous les discours. Je prononce le mot mort avec un o fermé alors que j’entends certains qui insistent sur cette voyelle, la dramatise. Il y a mort et mort selon l’imagination qu’il nous conviendra d’en broder. S’écouter parler. Air connu. Mais plus encore s’écouter parler de la mort. Des fenêtres s’ouvrent, le froid et l’air frais qui s’engouffrent dans la pièce presque vide. Pas de Maitre pas d’élèves juste des êtres qui dorment plus ou moins profondément.