
contrainte: 480 caractères, un fragment du corps. Ponctuation unique le tiret quadratain.
4h52. Quelques notes concernant l’usage du carnet et l’exercice en particulier. Le terme de laboratoire. Le domaine privé et le public. La limite à laquelle penser pour ne pas « mettre mal à l’aise le lecteur ». Ce qui implique en amont une intention d’être lu. D’écrire pour être lu. Ce qui pose à nouveau la question de l’intime. Sa frontière. Autrement dit ce que représente l’intime dans la réalité d’une écriture . Noir sur blanc. Ce qui est sans doute une piste pour la relecture de tous les textes de ce blog. A partir de quel indicateur sait-on que l’on transgresse cette frontière. Et, est-elle là même pour chacun. Pire comment se permettre d’imaginer une frontière collective, celle-là même contre laquelle on se sera révolté toute une vie. Parce que la notion d’intime renvoie à une notion de chasse gardée de trésor amassé encore une fois. Un coffre-fort que tout bon cambrioleur n’a comme unique obsession que celle de trouver le code et de dérober le contenu. Effet miroir probable, ce que l’on chercherait à dérober à l’autre, on se le dérobera inévitablement à soi-même. Le mot déballage. Éviter le déballage. Renvoie aussitôt à cette idée d’emballage. et à cette angoisse qu’une fois cet emballage ôté il n’y ait rien. Ou tellement peu que l’on s’interroge sur la nécessité d’un emballage si élégant, si luxueux. La notion de mystère que l’on crée pour faire croire qu’il y a quelque chose, exponentielle au ridicule que l’on y découvre à terme. Se retrouver avec une montagne d’emballages et rien dans le paquet. Cauchemar récurrent comme autrefois avec la notion de masque. Le pire serait qu’il n’y ait rien du tout. Pire encore: qu’il y ait vraiment quelque chose mais qui, malgré tant d’efforts restera invisible au voleur. Donc encore une fois la peur qu’il n’y ait pas assez qu’il en faudrait plus. Un manque de confiance dans l’existence qui reviendrait comme un boomerang. L’origine de la folie.
Faire confiance à ce fragment du corps. Le prendre comme une donnée du réel. D’une histoire. D’une existence entière. Y ajouter le terme de commun au sens du partage, du collectif. Que la main ne soit pas une main anonyme ni la main de x ou y mais une main possible pour tout à chacun. Il faudrait être un sorte de dieu pour parvenir à cela non. Pas dans l’idée de toute- puissance, la fameuse ubiquité, mais au contraire atteindre à ce dépouillement, cette humilité qui ne soit pas comme si souvent feinte, et ce sans même en prendre conscience.
La bouche par exemple.
Ouverte– fermée– le trait central entre les lèvres indique l’émotion- concave– convexe– ondulations de ce trait– vibrations– peut informer mais aussi leurrer si on connaît la musique– Le sourire de la narratrice dans Oublier Palerme — ces heures devant la glace pour copier un sourire américain–La bouche comme émergence d’un système complexe comprenant –le goût– la langue– la cavité buccale– par la- quelle on ingère la nourriture– la fumée de cigarette — le vin– l’eau– le froid qui flotte dans l’air– la bouche qui souffle le froid et le chaud– la bouche sans quoi aucun son ne sort– la voix– le son– les chants– les cris– les gémissements– les sanglots– les rires–la bouche qui embrasse une joue– un front– une main– la bouche à la rencontre d’une autre bouche– le bouche à bouche– la bouche qui explore– la bouche qui ne dit rien– qui reste scellée– la bouche bée– also bouche en cul de poule–les lèvres pâles de la bouche des morts– la bouche aux lèvres rouges– roses– violacées– la bouche tuméfiée– la bouche qui se moque– la bouche qui se retient de dire quoique ce soit–la bouche moulin à paroles– La bouche et la parole donnée– la bouche et les mensonges éhontés. Les Saint- Jean bouche d’or — et puis toutes les autres bouches– les plus ou moins bien embouchées.
7h en parallèle un chemin en peinture. pas de déballage. peu de chose. des fonds bleutés en ce moment. un protocole. coller des morceaux d’essuie-tout usagés plutôt que les jeter à la poubelle. faire un fond bleu turquoise. ajouter du noir. ensuite viendra le blanc. gommer. puis une autre couleur si nécessaire.






Pour revenir à cette histoire de déballage, d’intimité, de frontière à ne pas dépasser. A une pudeur donc. Comment s’y prendre quand justement écrire c’est écrire tout ce que l’on n’a jamais osé dire, parce que quelque chose en nous nous empêchait de le dire. Parce que cette pudeur était si collée à la peur, à l’autorité toute puissante- celle inventée en partie probablement pour avoir peur- parce que se faire peur est le propre des enfants. Si collée qu’on ne parvenait plus à la distinguer vraiment. Et on a beau se dire arrête avec ta peur, ça ne fonctionne pas ainsi. C’est comme dire lâche prise à quelqu’un pour qu’il se rétracte encore plus. Pour un peu ce genre d’exercice rendrait muet si on reste dans une telle fragilité. Mais peut-être qu’il faut aussi passer par ce mutisme. Il faut passer par tant de choses. Et plusieurs fois.
La notion de limites, la façon dont en parle ce texte, moi aussi y revenir. Merci.
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La question de la limite, de la pudeur est une vraie question. Flirter avec, les dépasser est une vraie tentation parfois. Pour secouer le cocotier et voir ce qui en tombe. Pour soi et pour les autres.
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la noix de coco sur le crâne c’est assommant, se méfier . peut-être pour ça qu’on laisse les experts les secouer, ou les fous, les poètes, les habitués aux coups du sort.
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la limite renvoie à ce qui est intime ou pas, ce qui est donné à voir (lire) ou pas et là-dessus le curseur que chacun déplace est tout à fait subjectif… Ce qui rend le ne pas dépasser la limite assez aléatoire…
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