
Les affiches de voyages contiennent tant d’images attendues inconsciemment que l’œil les repousse aussitôt qu’il les voit. Il glisse, s’évade, dans une périphérie proche immediate désormais, les fuit pour se réfugier sur le crépis d’un mur, une fissure, une tâche de ciment, un papier gras , un mégot roulant au sol. Dérapage de l’œil effrayé, dégouté. un œil qui ne voudrait plus jamais voir ce qu’il a déjà tant vu. Et l’accompagne, ou le pousse, une urgence à se réfugier, à rejoindre, même si elle est âpre, rugueuse, la sécurité de ce que tu nommes la réalité. Ce concept de voyage utilisant tous les codes de la séduction pour t’embobiner t’es devenu insupportable. Et peut-être est-ce parce qu’autrefois tu fus si bon public, que tu t’égarais dans la rêverie de devenir tel ou tel autre voyageur, mais n’était pas toi, que tu poussais la bêtise vers ce qu’elle peut celer de plus ultime, de plus ridicule ou tragique. Le fait d’être à ce point idiot d’aller jusqu’au bout. De réaliser des fantasmes qui en outre ne t’appartiennent pas, mais plus à une illusion collective, c’est justement ce qu’il ne faut pas, jamais faire. Tout désir s’y épuise et sombre dans l’ennui, et c’est ainsi qu’on s’imagine toujours en vie mais qu’en vrai on se retrouve sonné par la rapidité avec quoi on a passé le temps la frontière.Et soudain la flamme est soufflée, on parvient au pays des morts. Voilà ce qui ne va pas avec les affiches de voyage, les affiches de voyages te rappellent toutes que tu es mort. Et cela aussi pourrait t’attrister si tu ne conservais pas malgré tout un peu d’humour. Car tout compte fait, cette mort n’est pas si terrible, et parfois tu n’es pas loin d’accepter le fait qu’elle soit plus intéressante à vivre que n’importe quelle autre vie vécue autrefois.