
A Sonora tout est fait pour convaincre le voyageur de passage d’y rester. Et si , en outre, admettons qu’il se soit fait , par avance et grâce à l’imagination, une idée assez précise de la ville, cette dernière comme si elle avait eut le pouvoir de lire dans les pensées, les rêves les plus fous, les manifestait soudain dans chaque rue, chaque place, chaque impasse. A noter également que Sonora, pour un être totalement dépourvu d’imagination, n’eut été rien d’autre qu’une ville comme tant d’autres, une ville en perpétuelle métamorphose; et dont l’intention, par exemple un plan mûrit d’urbanisme, de vivre ensemble et qui eut été concerté entre les habitants et les hauts dignitaires de la cite , était de toute évidence inexistant. La politique que l’on pouvait découvrir avec assez peu d’effort de réflexion était que tout simplement Sonora désirait seulement plaire à tout le monde et sans doute rien de plus. D’ailleurs le même voyageur dépourvu de rêverie découvrait assez vite les fissures entre les immeubles, les ordures qui s’entassaient dans des recoins peu accessibles aux touristes, et comme dans toutes les villes du monde, s’il tendait l’oreille, les cris et les pleurs d’enfants et de femmes que d’indignes personnages passaient le plus clair de leur temps à maltraiter tout à coup devenaient cruellement audibles. La difficulté ensuite pour tout voyageur , en tous cas le mien, est toujours de trouver le bon équilibre entre l’imagination et la lucidité ; étant donné qu’aucun de ces deux points de vue ne soit à privilégier par rapport à l’autre. Le temps qui s’écoula entre une ville imaginaire que je m’étais inventée et la véritable Sonora, ne dépassa que quelques heures tout au plus pour dire toute la vérité. Puis très vite le réflexe me vint à nouveau de penser m’être trompé de ville; certainement n’étais-je pas encore parvenu à la véritable, l’unique Sonora. Et c’est exactement ainsi que je parvins à réunir les lambeaux de ma déception pour confectionner presque aussitôt une ville toute neuve encore intacte et à laquelle je donnais bien sûr de nouveau , le nom de Sonora.