le soulagement qui convient

Il convient en tant que récompense que l’on reçoit, ou que l’on s’octroie d’avoir traversé l’horreur. Mais comme à peu près tout peut ici-bas être transformé en horreur assez mécaniquement, il n’est pas sot d’imaginer qu’il puisse exister en nous de vraies sensations d’effroi comme d’autres qui seraient artificielles; artificielles uniquement d’ailleurs afin d’éprouver un soulagement au rabais de les avoir soi- disant traversées en restant indemne. La lecture de Lovecraft confère un type de soulagement étonnant mais que je ne parviens pas à classer dans une de ces deux catégories précitées. Sur un plan on pourrait se dire c’est une fiction, un divertissement, et l’angoisse, souvent tentée d’humour, est du même ordre, c’est à dire un passe-temps, mais la sensation de soulagement que j’éprouve à cette lecture semble avoir une autre source que cet inquiétude ludique si je puis dire. Ce soulagement dépasse d’une tête ou deux le plaisir de lire seulement un récit de fiction. Prenons le Cthulhu, ce texte qui nous entraîne dans un univers de tentacules et de parois poisseuses, il peut se lire à divers degrés, selon l’humeur, l’âge, l’idée que l’on se fabrique de toute fiction, l’engouement que l’on possède ou pas pour y pénétrer en tant que bon public, ou au contraire un esprit critique navrant qui nous empêcherait d’y pénétrer justement. Mais quel est cette abomination au fond du labyrinthe, ce labyrinthe crée par des phrases à rallonge, un style qui à première vue semble suranné, répugnera au lecteur pressé; j’aurais bien ma petite idée, une explication assez plausible. De là à la livrer c’est autre chose, et peut-être que de le faire ne me soulagerait pas, ce ne serait pour le coup qu’un soulagement artificiel. L’effroi sous-jacent à la fiction est lui véritablement effroyable, donc une certaine dignité s’impose, même au plus indigne des hommes face à celui-ci. Et d’ailleurs n’est-ce pas justement par ce silence qu’une dignité devant l’effroi se récupère pour ainsi dire – si toutefois c’est possible… Et si cela est vraiment possible, n’est-on pas en droit alors d’en être soulagé d’une façon indubitable , de s’octroyer enfin à soi-même , le soulagement qui convient.

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