La reconnaissance

reconnaissance faciale …

Dans l’entreprise, la dernière où j’ai compris que je n’avais rien à y faire, à part être suspendu à l’attente d’un virement en fin de mois, j’ai découvert une chose qui sera par la suite le pilier d’une incroyable discipline. Cette chose c’est le besoin de reconnaissance. C’est un besoin profondément humain et lorsqu’il n’est pas satisfait il y a de grandes chances pour que le merdier s’installe. Pour je ne sais quelle raison ce besoin reste souvent logé dans une strate inconsciente. On n’y réfléchit peu. On se plaint quand le mal est déjà fait, quand une douleur se manifeste par petits signaux auxquels on ne prend pas garde, comme une dent qui commence à se carrier. Quand la douleur devient insupportable en revanche on serait bien en peine de trouver un dentiste. Le manque de reconnaissance ne bénéficie pas de guérisseurs patentés. Être reconnu en entreprise mais pas seulement, dans la vie de tous les jours, peut même devenir une maladie grave si on fait preuve de négligence, de laisser-aller. C’est pourquoi de plus en plus les entreprises y travaillent ardemment, avec leur logique d’entreprise, c’est à dire dans une perspective de rentabilité. On emballe évidemment ce mot de vivre ensemble ou d’autres substantifs et locutions à la mode, mais dans le fond ça ne modifie en rien le but, maintenant que tu es reconnu, bosses et rapporte. Ce qui crée une ambiance bizarre si, à un moment, on prend un tout petit peu de recul. On s’attarde sur des détails nouveaux, un sourire mécanique, une poignée de main faussement chaleureuse alors qu’on éprouve en même temps sa moiteur, une attention soudaine exagérée à la vie familiale, les enfants vont bien ? quelle classe déjà ? et le petit dernier a t’il fait ses dents ? bref tout un ensemble de questions qui, je livre ici mon humble avis, m’ont toujours parue chiantes et produisent un malaise encore plus grand que le net manque d’attention, de reconnaissance du jour precedent. Peut-être que cela fonctionne pour une majorité de personnes et je m’en réjouis pour elles mais pour moi pas du tout. Reconnaître l’autre ce n’est pas lui déballer tous les signes convenus, stéréotypés d’une idée de reconnaissance. Pas du tout. Cela demande bien plus de créativité que de suivre des templates. Créativité car il n’y a pas deux êtres humains semblables. Même si on a tendance par paresse à catégoriser les gens par groupes en leur collant une étiquette, c’est simplement une facilité due à la paresse, et aussi à un point de vue borgne. Borgne parce que fixé uniquement sur un but: que les choses se passent bien pour qu’on atteigne au résultat, souvent le pognon. Alors que l’on pourrait atteindre ce but de mille façons différentes, et dans une toute autre ambiance que celle crée de toutes pièces par des faux-culs, des handicapés du muscle cardiaque ou privé de la partie droite de leur ciboulot, là où se loge l’intuition, la sensibilité artistique, une appréhension de la durée totalement contraire à ce qu’elle est quand elle suinte du cerveau gauche. La non reconnaissance est très proche d’une reconnaissance standardisée. On fini plus ou moins par éprouver le même manque, la même douleur, la même amertume, le même ressentiment et pour finir la même colère. Et bien sûr on se place suite à cela comme victime. Et bien sûr on trouve des ennemis responsables de ce fait, et ils sont faciles à trouver. Se passer de reconnaissance est-il possible ? ce serait la solution à de nombreux maux. Six mois environ avant mon départ de cette entreprise, la dernière de toutes, j’avais cru trouver une excellente parade au besoin effréné de reconnaissance. J’ ai installé un jeu vidéo sur mon ordi au boulot et j’ai commencé à jouer. Au début quelques minutes par ci quelques minutes par là, puis à la fîn toute la journée. C’est à dire que je torchais la charge de travail à faire en à peine une heure, et c’est la plupart du temps tout à fait possible, puis je rentrais dans mon avatar sur le jeu video. Ils sont bien fichus ces jeux. Vous avez là aussi un certains nombres de taches à cocher, mais par contre, au bout de chacune on vous remercie, vous gagnez un nouveau pouvoir, des pieces d’or, des vies supplémentaires etc. Pour un type en manque permanent de reconnaissance ça ne peut pas tomber mieux, c’est le nirvâna. Sauf que la reconnaissance que l’on vous accorde dans le jeu vous y attache tellement que vous ne pouvez plus en sortir. Du coup vous percevez le monde en dehors encore plus lamentable, égoïste, etc etc… et donc vous retournez le plus vite possible, dans votre bulle ludique refaire le plein de reconnaissance, qui rétribuera honnêtement enfin tous vos efforts. Tant que vous payez l’abonnement tous les mois.

Tout me fatigue vite, c’est un effet de l’âge, de plus en plus. La connerie, la mienne celle des autres, me fatigue. Parfois je rêve d’un monde autre évidemment. quelques minutes à peine , car je sais que c’est un rêve dont il faudra se réveiller tot ou tard en urgence. La solution fut donc de tout arrêter. Le jeu, le boulot, puis me tirer de là. Prendre le temps de réfléchir. Ce n’est pas venu d’un coup. Il aura encore fallu que je me casse beaucoup de fois les dents avec cette affaire de reconnaissance. Je ne vais pas tout énumérer ici, ce serait beaucoup trop long. Tenter de se passer d’un besoin essentiel n’est pas une petite affaire. Mais avec ténacité, persévérance, on parvient à tout, ou à peu près. Désormais aussitôt que j’éprouve une légère douleur au niveau de mon besoin de reconnaissance, j’y suis attentif. Comme un entomologiste à propos d’une nouvelle espèce de chenille ou de parasite. Je prend ma loupe et examine attentivement tous les tenants et aboutissants de l’histoire que je me serais racontée à moi-même. Et il n’est pas rare que je remonte au faux-pas qui aura entraîné ce trébuchement. À cet instant mentalement je rectifie mon assiette et la douleur étrangement disparaît au même moment. Il n’est pas totalement sot de penser qu’à la fin des fins je pourrai me passer totalement de toute velléité de remerciement comme de reconnaissance, je serai enfin un homme libre et pourrai par conséquence, il faut aussi l’espérer quitter ce monde sans le moindre regret. Ce type est passé nul ne l’a reconnu comme épitaphe svp.

Votre commentaire

Choisissez une méthode de connexion pour poster votre commentaire:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.