
Hockney est devenu visible par ses piscines. Mais quand on parcourt son œuvre on voit à quel point il a peint de différentes façons, parfois enfantines ou abstraites. De plus malgré la pression très forte autour de lui il n’a jamais dit qu’il désirait faire partie de près ou de loin du Pop Art. C’est un véritable outsider, un inclassable. Plus sympathique que l’affreux Dubuffet. Mais un peintre se soucie t’il d’être sympathique ?
Sur mon autre site je poursuis sur les « carnets » je n’avais pas pensé aux photographies jusque là. Et puis soudain en effectuant une recherche par hasard sur la photothèque de l’Ipad je retrouve des images de 2004. Vertige. Cela oblige à revenir patiemment dans toutes ces photographies dont la plupart ne sont pas légendées ni vraiment localisées. Recréer des albums , replacer ensuite dans un contexte. Même des factures, des tickets de carte bleue peuvent être utiles pour se refabriquer une histoire du temps.
Et puis le vertige est trop puissant je m’en écarte pour faire une petite peinture sur papier. Bleu de céruléum, jaune de cadmium et un rouge de cadmium clair., guère de blanc. Il en résulte une grille. La question ensuite serait : est-ce que je vois le monde à travers de telles grilles ou bien je place des grilles devant moi pour que le monde ne me voit pas ne me voit plus… peut-être un peu des deux ou rien de tout ça. Il s’agit juste d’une recherche d’accords de couleurs.
J’ai déjà fait ce travail des dizaines de fois, sur papier ou sur toile. Mais le souvenir en est vague, je ne parviens pas à restituer ça dans une époque dans une chronologie « normale » , d’où l’intérêt de chercher à classer les photographies que j’ai pu prendre- en espérant que j’en ai pris. Sinon il reste aussi la spéléologie pour aller dans les caves ou au grenier retrouver des traces. Encore une fois se pose la question d’une existence intemporelle qui ne soucie pas des choses faites mais de celles à faire au présent, quitte à réinventer plusieurs fois la roue.
Le fait de se raccrocher à une histoire, fut elle celle de l’art et plus précisément de la peinture, revient aussi à se créer une place, un temps, se créer tout court, à s’incarner. Ensuite il y a bien sûr la nécessité d’un désir d’une envie. C’est certainement comme renoncer à l’alcool , au tabac, un peu difficile au début et puis on finit par s’y faire, on peut même en éprouver une certaine satisfaction, une sensation bizarre de liberté.
forte émotion de voir le tableau de l’Annonciation de Fra Angelico repris par Hockney puis cet autre toile sur laquelle on voit un couple dans une pièce. La femme est la vierge Marie, son écharpe est un vagin, l’homme assit en vis à vis semble abattu, sur ses genoux un chat blanc, et plus loin par terre présence du Verbe sous la forme d’un téléphone.

En même temps ce vide entre les êtres, spécifique à l’Amérique, que l’on peut retrouver chez Hooper. Ce vide que j’ai aperçu sur des images des manifestations d’hier, dans les rues de Paris. Le même qui a gagné le monde entier. Une disparition de la culture, le vide laissé par son absence, de son ignorance désormais. Et en regard cette haine cette violence inouïe qui fera feu de tout bois pourvu qu’elle s’exprime.
Dubuffet : j’ai son livre « Asphyxiante culture », j’aime bien sa démarche hors normes.
Manif d’hier à Paris : j’y étais (avant que cela ne dégénère grâce aux Black blocs que Darmanin – il faut croire que ça l’arrange pour pouvoir crier, comme son Chef, à « l’émeute » qui nous guette) ce n’était pas du tout le vide… même si tu en parles d’un point de vue métaphysique, mais la joie et la fraternité.
Il n’y avait aucune grille pour barrer cette expression de « la foule ». 😉
J’aimeAimé par 1 personne
c’est toute la différence entre être dedans ou dehors, mais oui la métaphysique contre l’hystérie j’ai toujours préféré 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Tant de choses dans cet article. Chez Hockney, bien sûr, les piscines, mais je suis fascinée par ses montages photos. J’ai essayé de comprendre, de faire et finalement renoncé, ce qui me ramène toujours avec plus d’intensité à ces images magiques devant lesquelles je cherche comme si je parcourais un labyrinthe.
Les archives photographiques, je suis toujours en train de fouiller dedans, de les classer au mieux, d’en faire « quelque chose » hors numérique. En ce moment, tout ce qui a marqué mes visites au palais de Tokyo, depuis vingt ans (souvent des vernissages bourrés de monde), ce qui est frappant ce sont les gens que je photographiais regardant les oeuvres, ils semblent plus présents que les oeuvres dans nombre de photos. Ce sont eux qui ont faits mes souvenirs de ces soirs-là. Hier, je pensais aux histoires possibles liées aux mouvements, aux postures, aux relations que j’ai captés durant toutes ces années, aux vies croisées. Parfois photomontages où se retrouvent trois ou quatre fois la même personne, déplacement dans l’image. J’avais pour habitude de dire que l’oeuvre était souvent plus du côté des visiteurs. Je fais mes livres d’archives, travail de longue haleine. Il y aurait de quoi écrire, mais je remets toujours aux lendemains, l’image est si parlante.
Le vide entre les êtres, pour moi ce sont les photographies de Grégory Crewdson. Ce qui se rapproche beaucoup des tableaux de Hopper. J’aime les deux. Et Hockney.
Quant à la culture… Il y a des résistances.
J’aimeAimé par 1 personne