
On a tous son Rabelais, et c’est drôle de constater que c’est chasse gardée souvent et depuis bien longtemps. C’est dire à quel point dans l’imagination de la langue il tient sa place, même si on ne l’a que très peu lu. Parfois d’autant plus est l’importance qu’on ne l’aurait pas lu. La difficulté je m’en souviens était de vouloir le lire mentalement à l’école. Il aura fallu beaucoup d’années pour retraverser cet imaginaire conditionné, se rendre au texte et le prononcer de vive voix. Au début on bute un peu sur les expressions, la graphie des mots, les conjugaisons, mais à l’oreille peu à peu un souvenir nous vient, on se sent de plus à plus à l’aise de le dire tout haut.
Ce n’est pas innocent que le vieux françois revienne. Dans tout ce qui se délite de nos jours on cherche sans doute un appui solide et quoi de plus solide que la langue avec laquelle on pense ou s’exprime, qui crée notre corps et nos mouvements.
Je suis émerveillé par le travail de François Bon, son projet vidéaste d’aller sur les lieux et lire à haute voix des passages entiers de Pantagruel, Gargantua et tout le tutti. Que Rabelais nous revienne comme il a dû venir à ses contemporains par l’oreille j’imagine est vraiment un soufflet opportun à la parole gelée qui nous submerge. Ce printemps avec les premières vidéos de François refleurit la langue mais pas seulement, on peut l’apercevoir sur les fruitiers, nombreux ici en Isère, dans les cris tombant du ciel, le retour des hirondelles. Et je me dis qu’au lieu d’avoir chacun son Rabelais, faire comme cet autre François bien généreux, le partager aux quatre vents.
voici le lien pour suivre cette formidable aventure ( bien sûr c’est payant et c’est bien normal- mais à différents niveaux de bourse, allez voir )
François Bon parle de l’édition Bouquin, du Tout Rabelais, et wouah ! qu’est ce qu’on en apprend ou plutôt comprend !
Cette passion qu’il nous refile, de lien en lien. Au début je me disais, je vais juste y goûter, me dévergondée, juste un peu parce qu’on n’a pas que ça à faire. Mais c’est qu’on y prend goût à l’écouter le François, et surtout à le vivre dans cette langue qui nous devient familière. De passage à Paris, hier, je me suis pris le Tout Rabelais, de chez Bouquins, avec le Pantagruel avant le Gargantua. C’est mon temps qui déborde, il ne sait plus où donner de la tête. Mais c’est tellement bon.
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