blessure

Peinture numérique

Ce qu’offre la blessure c’est la mort et c’est la vie, l’épreuve d’éprouver que l’on surmonte bon an mal an. Sauf quand on s’y attache. Le goût salé du sang qu’on lèche, si enivrant. Ce qu’ôte la blessure est l’illusion d’une illusion, le bien-être change de main, une partie rapide de bonneteau. Le bonheur d’avant, un vieux goût trop sucré, un goût de pêche Melba. On s’en écœure de nostalgie. Mais la blessure te réveille. Tu découvres de nouveaux goûts, pas seulement celui des citrons acides. Ce que produit toute blessure c’est un bonjour ou un ciao qui nous revient comme un écho, il aura fait un long voyage, un court chemin. mais dans un cercle. Un cercle, une petite bulle dans laquelle tu te tiens Par les blessures qui cicatrisent, l’écorce de l’arbre , la noirceur du raifort parisien. Que pousse l’un vers le ciel, que l’autre s’enfonce dans la terre. En haut en bas. vous y voyez de l’importance, peut-être même une préférence. moi pas. Quand le mal est fait on le connaît mieux, pas pour autant qu’on peut se dire— j’en ai vu d’autres— non. Tout de même pas. C’est l’inédit de chaque blessure qui nous enseigne l’inédit.

Attirance et répulsion

Se pencher attentivement sur le rythme attirance-répulsion. Que ce soit en peinture, dans l’écriture et bien sûr les êtres que l’on côtoie. Comment ces rythmes naissent, à quel moment la répulsion devient attirance ou le contraire. Ce n’est jamais vraiment tranché. Comme si toujours il fallait laisser une chance à ce mouvement interne de s’effectuer selon sa propre pente. Chez certains êtres la réalité des relations se construit ainsi par ce binôme d’émotions indissociables. Cela peut même changer rapidement en l’espace d’un instant sans que rien ne soit arrêté. Sans qu’un choix soit décidé une bonne fois pour toutes. Ou alors si cela arrive c’est que l’autre est mort. Et encore ce n’est même pas vrai. Je repense à la conversation de Villeneuve sur Berg. Cet homme qui vient dit-il d’un univers bourgeois et qui devient éducateur d’abord dans le monde carcéral des adolescents puis de la prostitution, de la délinquance. Ce qu’il dit sur l’établissement des limites. A partir du moment où les jeunes sont astreint à des horaires fixes pour se lever le matin, déjeuner, travailler, s’amuser, qu’ils peuvent s’appuyer sur des repères leurs conditions de vie peuvent nettement s’améliorer. N’est-ce pas le propre des jeunes des ado d’être pris dans cette mécanique d’attirances et de répulsions qui les domine. Et qui sait aujourd’hui quand se termine cette fameuse adolescence. Dans ma tête je suis en même temps jeune et vieux. Je suis toujours soumis à l’attirance répulsion comme un adolescent. Sauf que j’en ai conscience que je continue à étudier ces forces en présence perpétuellement présentes en chacun de nous. Même si sous prétexte de maturité on pense les avoir domptées. Et que pour ce faire on se soit bardé d’habitudes de rituels ou d’œillères. Et on appelle ça la maturité ou la sagesse. Je dirais bien un gros mot à ce point précis de ma pensée. Mais non. Un sourire suffit. Le sourire du chat du Cheshire. Ces derniers temps une attention plus accrue à certains faits divers. Un jeune tue sa petite copine. Plusieurs fois. Attirance-répulsion dans sa version la plus ultime. Est-ce que j’aurais pu tuer à leur âge, non car à l’époque j’étais trop tenu par une morale déjà. Je connaissais un minimum de limites entre l’imaginaire et la réalité telle qu’il en faut bien une pour vivre avec les autres. Par contre des pensées de meurtre certes oui. Le fait que le passage à l’acte ne s’effectue pas ou s’effectue justement n’est-ce pas du à cette confusion entretenue entre le rêve et le réel. Toutes ces histoires à dormir debout sur l’amour… plus belle la vie, l’amour est dans le près, prendre les vessies pour des lanternes… mais allez vous éclairer la nuit ensuite avec une vessie à bout de bras hein. Hier soir le groupe des adultes. J’aurais dû m’enregistrer. Je leur ai proposé un exercice en peinture où l’habituelle rêverie liée à la profondeur était bannie. Pas question que l’on voit un paysage, pas question que l’on utilise les plans pour s’enfoncer dans la profondeur et cette rêverie. De la surface voilà ce que je veux, tout et rien d’autre dans l’épaisseur et la surface. Du crade et surtout pas du joli ou du beau. Je crois avoir aperçu ça et là dans les regards de véritables lueurs meurtrières. Une seule personne pour le moment a bien voulu jouer le jeu. Et encore pas assez crade. Mais je ne vais pas me plaindre que la mariée soit trop belle aller.

Dans quelle mesure

Une expression qui revient souvent. La recherche permanente d’une distance adéquate. En peinture bien sûr c’est devenu une évidence de poser le chaos en premier lieu puis de se reculer pour tenter d’y déceler un embryon d’ordre à venir. Pour l’écriture je peine. Pourtant c’est à mon avis exactement la même chose. Lâcher sur le blanc tout ce qui vient, ça pas de problème pour le faire. Mais ensuite comment trouver cette fameuse distance pour déceler un ordre, c’est à dire souvent une amputation du superflu de l’inutile, ça j’ai du mal. Impression que si j’y touche je trahis quelque chose, une spontanéité que je place sans doute à un degré qui ne le nécessite pas. Un degré supérieur sacré pour moi. Ce sacré et ce moi si intimement imbriqués qu’ils ne parviennent justement pas à se détacher à prendre leur mesure. Autrefois quand j’écrivais sur mes carnets, c’était le recul apporté par l’écoulement du temps entre écrire et relire qui permettait, croyais-je, de prendre la mesure. Sauf que je ne corrigeais rien. J’éprouvais un malaise le plus souvent. Entre ce que l’on croit écrire d’intéressant et que l’on découvre banal par la suite. Banal ou bien qui indique trop la faiblesse, la maladresse, l’ignorance qu’on n’est pas en mesure de supporter à la relecture parce qu’encore trop attaché au moment, à l’imagination associée à une ambiance d’écriture. A ce personnage de narrateur que l’on s’invente aussi afin de se lancer dans le blanc. C’est sur ce point précis, la mesure, qu’il faut encore réfléchir. Se mettre à la place de l’autre, souvent un danger. Ou alors la fatigue de toujours écrire la même chose sous tant de façons différentes que l’on finirait par appréhender enfin cette chose, et partant l’ayant découverte se trouver enfin en mesure de la simplifier. Dans quelle mesure ai-je la sensation que cette simplification me coute. L’effacement serait-il toujours le prix juste à payer. Ou encore, autre solution, placer une confiance indéfectible dans le lecteur en n’imaginant aucun lecteur en particulier. Une confiance dans le vrai Soi. Qu’un ou deux seulement parviennent à découvrir toute la complexité vaincue pour parvenir à ce simple et je serai bien content je crois. Mais étaler mon mode d’emploi, mes empêchements, mes blocages peut tout aussi bien être utile. C’est aussi être humain plus qu’écrivain à proprement parler. Je retrouve soudain le même empêchement quant à l’objet froid que représente pour moi une œuvre trop polie, trop léchée, trop parfaite dans une grille de lecture où l’on a placée, une grille qui a tout bonnement inventé une telle perfection. Autrement dit , il faut qu’une œuvre me dérange un peu. Que ce dérangement me ramène dans une certaine mesure à son origine, sa source chaotique.

perdu dans la tragédie amiotique

Cellules cancéreuses sur fond amiotique

Amiotique : qui n’a pas la capacité d’effectuer la mitose / Mitose : Lorsque le zygote se divise, chaque cellule fille reçoit une copie exacte et complète de son équipement chromosomique. Ce type de division est appelé mitose. /Reproduire des actes mais par nature tragique en modifier légèrement la copie à chaque action. Les dénaturer ou bien s’offrir ainsi au forceps parfois une piste, un sentier d’évasion. Sans doute que dans cette répétition devenue un automatisme, on ne puisse plus énumérer les essais ratés, la création de monstruosités. Mais la répétition du même n’est-elle pas pur fantasme. plus encore en ce monde tout entier voué au mécanique au clonage, à la pensée unique comme à la mondialisation. Est-ce possible de décider humainement que ce fantasme là d’une reproduction parfaite soit tout aussi monstrueux, et finalement contre nature. Comment interpréter la nature sinon en s’opposant encore et toujours à toutes les interprétations que l’on n’a jamais cessé d’en produire. La tragédie place les forces en présence et le spectateur regarde chaque acte, action-reaction de telles forces avec plus ou moins d’attention comme de compréhension. Mais ce qui se joue n’est pas du domaine de la pensée, plutôt celui de la fulgurance avec laquelle naît l’intuition. Autre définition de ce que peut être le cancer. Une opposition au monstrueux par le monstrueux. Et soudain l’expression “être un drôle de zygoto” employée par la grand-mère en parlant de moi.

importance du contexte.

S’appuyer seulement sur les faits, sur l’action, ce que je fais ordinairement afin de pousser l’imagination, c’est tailler souvent une portion du réel détachée d’un contexte. Difficile pour un lecteur lambda de s’y retrouver, un lecteur qui ne tomberait que sur un seul texte. Sans doute trop proche de la chronique. Encore qu’il y ait des chroniques très bien faites dans lesquelles le contexte ne soit pas oublié. Possible aussi que tout l’attrait d’un journal ou d’un carnet soit aussi ces paragraphes, ces fragments ajoutés les uns aux autres dans lesquels le contexte ne soit pas visible au lecteur. Mais qu’il se devine par l’accumulation justement de ces fragments. Il faut tenir compte de l’intelligence du lecteur par défaut. Il faut parce que ça me rassure. Mais en réalité sûrement pas. Il y a des codes dont on ne peut faire abstraction pour que l’absorption dans le récit fonctionne « normalement ». Penser au cinéma, aux genres. On va voir tel type de film parce qu’on sait d’avance le genre que l’on apprécie. Si on ne retrouve pas les codes que l’on connaît inconsciemment on se retrouve déçu. A moins que le réalisateur ne joue justement sur ces codes, qu’il les détourne et ce faisant nous réjouisse encore plus. Tarantino par exemple. Il est une règle habituelle de placer le protagoniste principal d’un film en premier lieu dans son quotidien jusqu’à ce qu’un élément déclencheur modifie ce quotidien. Scènes tranquilles, on place le décor, l’environnement, des actions familières, puis paf un couac. Le quotidien d’un tueur à gages par exemple n’est pas le même que le vendeur d’encyclopédies en porte à porte. Mais désormais tous ces films produits sur un système de canevas, des plans calqués tous sur un même modèle, insupportable. Il suffit de prendre un chronomètre et de visionner les films pour comprendre ce fameux plan. Tant de minutes prévues avant l’apparition du fameux élément déclencheur, puis tant d’autres avant le premier rebondissement, alternance des moments de calme et des moments d’action, combien de minutes encore pour arriver à la scène de cul, et combien d’autres pour péniblement parvenir au climax. Le même film finalement. On change juste l’emballage. Et c’est pareil pour les séries. Pour les bouquins aussi, tout ce qui de près ou de loin touche au genre, à un genre formaté quelqu’il soit. D’où mon agacement chronique face au genre et par conséquence au fameux contexte. Mais pas d’autre solution cependant pour les auteurs qui veulent écrire pour pouvoir bouffer. Entrer dans ce moule. Ce qui me fait songer à tout le luxe que je possède de ne pas avoir besoin de publier mes écrits pour en vivre. Et aussi comment aurais-je fait si les circonstances m’avaient conduit à ne pas vouloir trouver d’autre solution que celle d’écrire pour vivre. Pourtant j’écris pour vivre d’une certaine façon. Je veux dire que je ne peux plus m’en passer désormais. Qu’une seule journée sans avoir écrit une phrase est pour moi une journée fichue. Il y a vivre et vivre. Il y a aussi beaucoup d’orgueil derrière tout cela.

Pathos

Un vieux mot grec devenu synonyme de n’importe quoi. Mais justement il n’y a que ça de bon le n’importe quoi non. Ce qui n’empêche nullement l’agacement premier de surgir comme un beau diable de sa boîte. Tu lis un texte, le pathos te saute à la gorge, tu voudrais zapper. Premier réflexe. Faut s’accrocher tout au contraire. Mesurer l’écart. Toujours mesurer l’écart. Ne pas confondre avec s’écarter. Ce qu’on apprend de soi quand on se retrouve confronté à cette gêne. C’est comme découvrir un furoncle sur un beau cul. Cela ne colle pas avec l’imaginaire. Pas plus qu’avec la réalité que l’on est toujours tenté de désirer. Le pathos joue un rôle déclencheur, provoque un déclic, clic clac à un instant T dans cette bouillie de pensées dans laquelle nous ne cessons jamais de patauger. Ce que provoque le pathos, d’abord cette sensation pénible de déjà-vu, de trop vu, quelque chose qui flotterait à la surface, un genre de liquide graisseux, oléagineux, masquant la limpidité rêvée d’une eau qui selon le sens accordé aux choses naturelles devrait couler de source. Mais le son perçut éveille quelque chose d’inédit qui ne vient pas. Pire, qui remet en question notre souhait d’inédit. On s’attend à prendre de l’altitude et on retombe au sol comme une merde. Voilà ce que j’apprécie peu a priori dans le pathos. Mais je ne suis pas un homme d’à priori. Enfin je m’efforce d’en sortir le plus souvent qu’il m’est donné d’y penser, puis de pouvoir effectuer un effort pour y parvenir. Parfois il y a meme un sacré décalage entre le moment où je me dis merde quel pathos, et le commencement de cet effort pour me remettre en question. Je crois que c’est lié aux propriétés intrinsèques de la naïveté. On n’est jamais aussi naïf que lorsqu’on refuse la naïveté. Quand on imagine être doté d’une lucidité. Il n’y aurait certainement pas de pathos sans cette pseudo lucidité. Cependant à bien me souvenir de tout ce que j’ai vu et pensé à l’âge de cinq ans n’était-ce pas justement contre cette prétendue lucidité des adultes que je combattais. Qu’une part de moi n’a jamais cessé de combattre. Le pathos, autrement dit ce déversement brouillon d’un état d’âme, cela fait partie du travail d’écrire que de s’obliger à le relire. À chercher ses tenants et aboutissants, à en extraire une sorte de quintessence. Parfois il suffit de peigner le texte, le débarrasser de ses pellicules, de ses poux, de ses lentes, de tous les empêchements mis en place pour le rendre illisible. Pas forcément trop bien peigné. Mais clair déjà. Et pour atteindre à cette clarté prendre le pathos à bras le corps. Le secouer comme un prunier. Dis moi clairement le nom de ton putain de fruit bordel. Ne surtout pas aller selon sa pente. Résister, tenir bon. Malheureusement le pathos est un peu comme le diable. On croit qu’il a disparu, que l’on en a fini avec lui et soudain on s’aperçoit qu’il revient à la charge là où on l’attend toujours le moins. Que depuis notre lucidité on est justement en train de nager en plein pathos. Une solution serait d’en rire si ça ne faisait pas grincer des dents ou pleurer. Mais non, revenir à l’aspect pratique, terre à terre, d’abord se rendre chez le dentiste, régler le foutu problème du sourire.

certitude

La réalité et la fiction ne peuvent se passer l’une de l’autre. Le mensonge naît d’une interrogation quant à la réalité, sur la notion de limites que l’on associe comme synonyme du mot réalité. Le mensonge serait alors une exploration des limites. Le mensonge n’aurait pas grand chose à voir avec la morale. L’amour ne connaît pas de règle entendu hier. L’amour et le mensonge. Une double exploration à première vue, mais que je suspecte ce matin de n’en faire qu’une. Et puis qu’advient-il d’un homme qui se retrouve certain d’une certitude. Que la plupart de nos actes, de nos pensées, de nos émotions ne sont que des fictions, autrement dit des mensonges nécessaires pour augmenter le périmètre d’une réalité trop étriquée pour nous tous. Association quasi permanente entre le mot artiste et le mot menteur. Alors que désormais les mot sincérité, authentique, participent à un langage de douaniers. Un texte encore de Ferré, « poètes vos papiers »…

lacunaire

José Alberto Mujica Cordano, surnommé Pepe Mujica, est un homme d’État uruguayen, né à Montevideo le 20 mai 1935. Il est président de la République de 2010 à 2015. Guérillero des Tupamaros dans les années 1960-1970, il est détenu en tant qu’otage et torturé sous la dictature militaire Après le rétablissement de la démocratie, il participe à la création du Mouvement de participation populaire (MPP) avec le Mouvement de libération nationale Tupamaros (MLN-T).
Élu député en 1995 et sénateur en 2000, il est nommé en 2005 ministre de l’Agriculture du gouvernement Vázquez. En 2009, il remporte la primaire présidentielle au sein de la coalition de gauche du Front large, puis est élu au second tour de l’élection présidentielle contre le candidat du Parti national, Luis Alberto Lacalle.
En tant que chef de l’État, il refuse les avantages inhérents à sa fonction et mène des réformes sociétales. Ex-guérillero d’extrême gauche, il conduit une politique de nature sociale-démocrate par pragmatisme affiché, tout en dénonçant la logique de consommationengendrée par le système capitaliste, dont il souligne le coût humain et environnemental.
En vertu de la Constitution, il ne peut se représenter à l’issue de son quinquennat présidentiel. Il siège ensuite à nouveau au Sénat.

Principalement composé de vide. Définition trouvée ce matin. Le vide me renvoie aussitôt à la peinture. A un rapport entre le plein et le vide. Et aussi à l’idée que la vision occidentale du vide correspond à un manque. Alors qu’en Asie le vide soutient en grande partie le plein. Des souvenirs lacunaires ce serait quoi. Une composition avant tout, un surgissement produit par une respiration. Non par un manque mais par un rapport esthétique. Ainsi le goût d’un rouge à lèvres. Rouge baiser la couleur associé à l’embrasement, à l’embrassade. L’ambassade d’un mot ancien arrivant soudain en terre étrangère, c’est à dire au présent. On me croit ici mais non. Toujours ailleurs. En Uruguay par exemple. Et ce vieil homme aux yeux encore remplis de désir. Des yeux sombres et brillants. Un président paysan. Une relation entre pauvreté et abondance, une résistance tranquille. Pépé Mujika soudain derrière « Rouge baiser ». Puis un champs dont la terre rouge et noire vient d’être retournée non par une machine, mais à main d’homme.

Candeur

Au hasard d’une lecture le mot candeur, assez peu utilisé voire plus du tout dans la langue de tous les jours. Ce que provoque la rencontre d’un tel mot dans un texte me surprend tant que je vais vérifier la définition.

Pureté de l’âme, confiance, franchise d’une âme pure. La candeur de ses mœurs. Agir, parler avec candeur. Avouer une faute avec candeur. Un procédé plein de candeur. Un faux air de candeur. Fausse candeur. On dirait la candeur même.

Il signifie, par extension, Confiance excessive venant de la naïveté. Abuser de la candeur de quelqu’un.

La pureté répétée est un indice. Tout comme la fausseté.

La candeur m’est désormais interdite si je me fie à cette notion de pureté à laquelle le dictionnaire l’associe. Il reste la fausseté à considérer. La fausse candeur. En suis-je encore capable ? probablement. Sauf que je n’utilise jamais ce mot je lui préfère fausse naïveté. Toujours une joie secrète de paraitre plus con que j’ai la sensation permanente de l’être, surtout vis à vis de certains fâcheux qui eux en sont souvent de véritables.

Mais de quelle pureté, de quelle fausseté est-il vraiment question dans la définition donnée. Je crois que nous avons tous en nous cette notion de pureté et de fausseté. Nous les recouvrons de maintes dissimulations, nous les éprouvons dans le sens où nous les mettons aussi à l’épreuve. Jusqu’où pureté, fausseté ou sincérité tiendront est la fameuse question que nous nous posons juste avant de nous perdre dans l’oubli. Quand on y réfléchit ensuite on trouve toujours moyen d’agrandir les périmètres des définitions. Le pédophile doit aussi se donner des arguments certainement pour agrandir sa définition du pur et du sincère. Ainsi c’est open bar. On se débat comme on peut. Cet propension à l’exagération, à ne pas vouloir accepter les définitions qui ont été fabriquées par des générations avant nous, à imaginer qu’il est facile de les remettre en question ou au gout du jour prouve que notre monde est vraiment bien malade. Encore qu’à Rome les éphèbes étaient légions, chez les Grecs c’était même un honneur pour un jeune homme de bénéficier des assauts de son protecteur et mécène. Bref comme tout est compliqué sitôt qu’on se met à penser.

Moi-même il m’arrive de vouloir faire le malin, d’imaginer parfois trouver un autre sens à certains mots. Mais je ne fais que corroborer une pathologie qui frappe tout le monde désormais.

En même temps la candeur appartient aussi à une époque révolue, quel intérêt d’y penser, d’être aussi surpris de rencontrer un tel mot dans une lecture. Est-ce que ce ne serait pas du laisser-aller, le genre à s’enfoncer dans la nostalgie comme sous une couette et se laisser envahir par une sensation douillette de confort ? Aussi douillette qu’illusoire probablement. C’est une véritable maladie que de se poser sans cesse ce genre de question. On ne peut profiter de rien avec candeur parce qu’on ne cesse d’imaginer tous les tenants et aboutissants qui à la fois la provoque, et toutes les conséquences qu’elle risque d’entrainer.

Je ne sais pas combien de cardinaux se retrouvent au ban, leur pureté sacerdotale ayant été mise à bas par les plaintes comme par leurs actes. On trouve cela dégoutant. Alors que de tout temps les moines du mont Athos passe le plus clair de leur temps à s’enculer depuis Mathusalem. On voit bien à quel point le protestantisme, et tout ce qui nous vient d’outre-Atlantique ruine peu à peu les définitions et aussi un certain esprit, une liberté de penser. Je regarde les élections américaines démocrates contre républicains la même rengaine depuis toujours. Les mêmes momies pharaoniques qu’on exhibe pour l’occasion. La candeur apparente présente aussi bien chez l’une que chez l’autre. Une candeur électorale. Merde de merde il faut que j’arrête de réfléchir à tout ça, je sens que je vais trop loin. Il faut que j’avance sur ma toile. Ma candeur si j’en possède encore un brin sera celle-ci pour aujourd’hui.

Au-delà

Un jeu d’enfant qui dure parfois longtemps, l’expérience des limites. l’espoir d’un au-delà. Tout à fait comme ce peintre dont j’ai perdu le nom qui perdait son temps à fabriquer des masques, à jouer l’acteur et qui pressentait, qui désirait sans doute parce que c’est dont il avait le plus peur, qu’au-delà de tous ces masques on ne découvre rien de plus. Un pas de plus encore à effectuer pour s’engager au-dessus du gouffre. Tenir sur le vide, avancer. Se le répéter comme un mantra : Il n’y a pas d’au-delà. Ce qui rend encore plus féroce la misère, la bassesse, toute une humanité prête à la moindre occasion à se jeter dans la barbarie. L’au-delà cette croyance est comme une laisse, une longe, et étrangement aussi l’une des fondations de notre civilisation. Que notre temps si désespérément moderne ne puisse se détacher de cette croyance en un au-delà qui se tient à chaque carrefour de la ville comme un agent de la circulation. Si tu travailles chaque jour de ta vie tu auras, au-delà, une retraite. Si tu cueilles ces fleurs des champs, que tu en fais un beau bouquet pour cette fille, au-delà elle t’ouvrira son cœur et ses cuisses. Le conditionnel et l’au-delà tellement ancrés au plus profond de tous nos gestes. Que la barbarie s’associe au présent pour commettre tous les méfaits possibles et inimaginables, c’est le revers de la médaille, la monnaie de la pièce. Encore que les barbares aussi possèdent aussi une croyance en l’au-delà très certainement. Au-delà des cités, au-delà des barres, au-delà des banlieues il y a les responsables tout trouvés de l’iniquité. Merde pourquoi les gens ne restent-ils pas tranquilles. Pourquoi font-ils chier autant les autres avec cette histoire d’au-delà. La peur de crever se métamorphose en désir de crever et vice versa. Un cercle vicieux. Même les bonzes les bouddhistes n’y peuvent plus rien. Tout est résolument fichu ici, et pas d’issue. Pas d’au-delà. Se le répéter encore et encore.

Et puis s’éloigner de l’ordinateur, descendre dans la cour s’apercevoir que la pluie est là, aucun oiseau ne chantera ce matin. Ouvrir l’atelier, s’installer devant la toile, rester là, résolument, et faire avec.