L’un des premiers colorants synthétiques crée par l’homme il y aurait 4500 ans.
On parle aussi de fritte de bleu égyptien à ne pas confondre avec le lapis-lazuli aussi utilisé pour le bleu.
Il s’agit d’un silicate double de calcium et de cuivre. En fonction du chauffage ( température, durée de cuisson ?) l’intensité des bleus est variable, s’étendant du bleu pâle au bleu le plus sombre. Le pigment est ensuite broyé pour utilisation. L’intensité du broyage va aboutir à des tons différents de bleus, et les artistes égyptiens l’ont bien compris et utilisé. Ils ont parfois joué avec les différentes tailles des particules de broyage, pour donner des aspects différents.
Il serait intéressant de connaitre la nature du fondant utilisé à l’époque c’est à dire quel type de cuivre, quelle quantité… ? et qui a pour propriété d’abaisser la température de fusion d’un ou de plusieurs éléments de la préparation durant la cuisson.
Le bleu , souffle divin, décore la coiffure de ceux partis dans l’Eternité. Un bleu éclatant ou coruscant.
Ce codage sous le rond bleu doit être particulier à INFLUENZ, le code hexadécimal du bleu égyptien étant #1e366d
#1434a2
rgb(20, 52, 162)
Cependant en utilisant un autre convertisseur on trouve encore un nouveau code…
On pourrait se fier sans doute un peu plus au code RGB en effectuant un calcul de pourcentage des trois couleurs ( rouge, vert, bleu ) qui le constitue.
20/255 = 7% de rouge
52/2500= 20% de vert
162/255= 63/ de bleu
Ce qui ne donne pas 100 % car il n’est pas tenu compte du blanc qu’il faut rajouter à chacune de ces proportions ( il faudrait ensuite faire des tests pour savoir si on doit répartir cette quantité de blanc sur les trois couleurs, deux, ou une seule… Un bon exercice à réaliser en perspective.
On l’appelle aussi bleu de Pompéi car il fut également utilisé par les romains pour décorer murs et confection de fresques mais il fut abandonnée vers 470 après JC.
Récemment on a cependant retrouvé ce pigment dans un retable d’une église de Barcelone ( Sant Pere de Terrassa) Ce qui est bien étrange car celui-ci semble dater de 700 ans plus tard. Des hypothèses furent échafaudées, soit on avait reinventé le procédé de fabrication, mais alors pourquoi ne s’est-il pas étendu à d’autres créations, ou alors une boule de bleu égyptien aurait été retrouvée on ne sait où et utilisée à cette seule fin de décoration de ce retable ci, et puis plus rien.
Un verbe important pour qui prétend vouloir dessiner et peindre. Hier en stage j’attire l’attention sur cette idée en désignant au delà des fenêtre et de la route le grand bâtiment, ancienne usine, désormais repartagée entre une association religieuse et une entreprise de sécurité. Sa façade très graphique notamment, des rainures verticales et horizontales avec au-dessus la répétition des obliques de la couverture bitumineuse. Des poutrelles de couleur bleue redivisent encore l’espace de la façade. Ce bleu est particulier, est-il clair, est-il intense, saturé ou pas ? la couleur ne cesse de changer plus on le regarde. Et ce changement impacte l’ensemble de la façade, le bâtiment entier, le paysage tout autour. Voir c’est une intention avant tout, puis une intensité, une fréquence, une intention de changer de fréquence. Passer de l’ordinaire à autre chose d’indéfinissable. Et c’est cet aspect indéfinissable que l’on doit malgré le risque qu’il nous échappe sans cesse tenter de trouver par la ligne, la couleur, la composition, l’ensemble de ces ingrédients. Est-ce affaire de technique, pas vraiment. En tous cas pas seulement. Bien sur il faut connaitre les couleurs sur le bout des doigts, savoir la quantité de jaune nécessaire – et quel jaune- pour atteindre le turquoise d’un bleu. Mais avant cela il faut voir ce bleu EN SOI , il est rarement visible à l’extérieur. L’habitude de voir à l’extérieur un bleu nous prive de sa réalité. Pour la retrouver il faut absorber ce bleu jusqu’à ce que l’on ferme les yeux pour enfin le tenir; ensuite on peut créer le mélange sur la palette; on sait ce que l’on cherche vraiment. On cherche une sensation de bleu on ne peut plus se tromper.
Ce qui empêche la plupart d’entre nous de voir est vraiment mystérieux. Les enfants voient et puis ensuite la pensée prend le dessus. La pensée c’est l’âge adulte, c’est cet aveuglement. Mais tout le monde a vu, tout le monde a été enfant, alors pourquoi cet oubli.
Hier lu l’occupation des sols de Jean Echenoz. Un court texte mais quelle histoire ! C’est difficile de lire Echenoz je ne m’en souvenais pas. Mais dès les premières lignes ça m’est revenu. Un état d’esprit à atteindre tout particulier comme pour voir un bleu. L’architecture des phrases, l’égarement soudain dans lequel on se retrouve après quelques lignes à peine. On irait chercher midi à quatorze heure, encore la pensée, l’intellect, mais il suffit de lire à haute voix pour saisir le pourquoi du comment. Retrouver quelque chose de l’enfance, surtout de la résistance associée pour moi à l’enfance.
Enchainement avec Ravel aussitôt, et je me retrouve soudain à Montfort l’Amaury. J’ai habité ici, pas très loin de l’Eglise, de ses vitraux classés. Mais quel est le nom de la rue, impossible de retrouver. J’ai ouvert Google Earth et je me suis promener dans les rues sans rien reconnaitre. combien de temps ai-je vécu là, pas plus d’une année, mais le temps suffisant tout de même pour refaire de fond en comble l’appartement que je louais dans cette vieille maison avec jardinet. Une panique soudaine de ne pas retrouver ce souvenir, cette adresse, cette rue. Puis je me calme c’était peu avant de déménager sur Lyon donc 1995, j’ai au moins ce repère de date. Mais tous les textes, les papiers administratifs, les photos, je me souviens que je les ai abandonnés plus tard dans une cave, en 2003, rue Henry Pensier, Lyon 8ème.
Je ne suis jamais allé chercher ces cartons, j’avais rendu les clefs de l’appartement à son propriétaire et c’était difficile de le recontacter par la suite, de dire j’ai oublié quelques cartons dans votre cave. Et aussi l’idée qu’il avait pu les ouvrir, lire certains textes, peut-être aussi tout jeter me rebutait. Peut-être n’avais-je pas envie de m’entendre dire qu’il les avait jetés. Et que les ayant laissés ainsi dans un doute si l’on veut, ils sont encore d’une certaine manière -enfantine ?- toujours à portée de main ou de mémoire. Mais leur accessibilité demande autre chose que de simplement les retrouver les ouvrir les explorer.
Il doit y avoir deux ou trois gros cartons pas plus. Pour le moment ils sont fermés avec du scotch dans l’obscurité d’une cave, certainement que tout ce qui relate mon histoire avec Montfort l’Amaury se trouve à l’intérieur de ces cartons. Est-ce que ça me manque ? Pas vraiment. Peut-être aussi qu’il faut accepter certaines pertes de mémoire comme une entreprise intègre les pertes ou les profits dans sa comptabilité.
Sauf qu’une comptabilité comptabilise, alors que moi j’en suis bien incapable la plupart du temps. Ce qui est d’ailleurs la source de nombreuses difficultés encore non résolues. tout à fait le genre de choses que je m’obstine- sans savoir pourquoi- à ne pas vouloir voir.
Il faut aussi cette folie ou cette sagesse de ne pas vouloir tout savoir du pourquoi ni du comment, comme il faut des mauvaises herbes sur les talus qui bordent les chemins.
Hockney est devenu visible par ses piscines. Mais quand on parcourt son œuvre on voit à quel point il a peint de différentes façons, parfois enfantines ou abstraites. De plus malgré la pression très forte autour de lui il n’a jamais dit qu’il désirait faire partie de près ou de loin du Pop Art. C’est un véritable outsider, un inclassable. Plus sympathique que l’affreux Dubuffet. Mais un peintre se soucie t’il d’être sympathique ?
Sur mon autre site je poursuis sur les « carnets » je n’avais pas pensé aux photographies jusque là. Et puis soudain en effectuant une recherche par hasard sur la photothèque de l’Ipad je retrouve des images de 2004. Vertige. Cela oblige à revenir patiemment dans toutes ces photographies dont la plupart ne sont pas légendées ni vraiment localisées. Recréer des albums , replacer ensuite dans un contexte. Même des factures, des tickets de carte bleue peuvent être utiles pour se refabriquer une histoire du temps.
Et puis le vertige est trop puissant je m’en écarte pour faire une petite peinture sur papier. Bleu de céruléum, jaune de cadmium et un rouge de cadmium clair., guère de blanc. Il en résulte une grille. La question ensuite serait : est-ce que je vois le monde à travers de telles grilles ou bien je place des grilles devant moi pour que le monde ne me voit pas ne me voit plus… peut-être un peu des deux ou rien de tout ça. Il s’agit juste d’une recherche d’accords de couleurs.
J’ai déjà fait ce travail des dizaines de fois, sur papier ou sur toile. Mais le souvenir en est vague, je ne parviens pas à restituer ça dans une époque dans une chronologie « normale » , d’où l’intérêt de chercher à classer les photographies que j’ai pu prendre- en espérant que j’en ai pris. Sinon il reste aussi la spéléologie pour aller dans les caves ou au grenier retrouver des traces. Encore une fois se pose la question d’une existence intemporelle qui ne soucie pas des choses faites mais de celles à faire au présent, quitte à réinventer plusieurs fois la roue.
Le fait de se raccrocher à une histoire, fut elle celle de l’art et plus précisément de la peinture, revient aussi à se créer une place, un temps, se créer tout court, à s’incarner. Ensuite il y a bien sûr la nécessité d’un désir d’une envie. C’est certainement comme renoncer à l’alcool , au tabac, un peu difficile au début et puis on finit par s’y faire, on peut même en éprouver une certaine satisfaction, une sensation bizarre de liberté.
forte émotion de voir le tableau de l’Annonciation de Fra Angelico repris par Hockney puis cet autre toile sur laquelle on voit un couple dans une pièce. La femme est la vierge Marie, son écharpe est un vagin, l’homme assit en vis à vis semble abattu, sur ses genoux un chat blanc, et plus loin par terre présence du Verbe sous la forme d’un téléphone.
En même temps ce vide entre les êtres, spécifique à l’Amérique, que l’on peut retrouver chez Hooper. Ce vide que j’ai aperçu sur des images des manifestations d’hier, dans les rues de Paris. Le même qui a gagné le monde entier. Une disparition de la culture, le vide laissé par son absence, de son ignorance désormais. Et en regard cette haine cette violence inouïe qui fera feu de tout bois pourvu qu’elle s’exprime.
La morosité est plus dangereuse que n’importe quel virus. Cette facilité avec laquelle bon nombre tombent dedans. Quand il ne reste plus que cette morosité pour réunir les gens on peut dire que quelque chose cloche vraiment.
Flanquer la morosité à la porte de l’atelier, colmater les fentes, boucher les trous par lesquels elle peut s’insinuer. Nettoyer palettes et pots des résidus déposés par celle-ci. Repartir encore une fois à zéro. Conserver la joie de peindre. Des verts tendres, des verts électriques, des mauves tranquilles, une terre rouge brique.
Antoine Carbonne s’inspire de David Hockney, une même idée d’espace et de couleurs les réuni. Hier j’ai passé un long moment à examiner leur travaux, puis à me déprimer. Il y a toujours cette faiblesse qui revient malgré tout effort pour l enfouir, la dissimuler. La comparaison.
Mais le fait est que cette comparaison soit comme un serpent de mer, qu’elle ne ressurgit que lorsque je repense à certaines scènes ou images enfantines. Hier encore je me suis demandé ce que ça donnerait si je peignais la maison familiale de La Grave en utilisant surtout les couleurs joyeuses d’Hockney. Le problème réside dans l’espace. L’espace est mon problème ma difficulté majeure. je le remplis trop. exactement comme j’écris. Le trop pour combler le pas assez qui revient, cette carence. Une caresse avec un n.
David Hockney Terrasse et piscine
l’espace et l’espèce, en l’espèce, ex peace, un paradis perdu, le retrouver en soi avant de penser l’offrir aux regards de l’autre. L’espace et Dieu ou encore l’Espace c’est Dieu. Comment ça se passe l’espacé quand on y croit pas, et au temps non plus. On remplit on rampe lit on rend pli pour pli, dent pour dent.
Quand on emploie les termes « au-dehors » ou « au-delà » ne font-ils pas toujours référence à un « ici ou là » ; ce sont des expressions reliées à ce monde. Au dehors ou au-delà ne peuvent exister sans l’ici ou là. Et donc tout ce que l’on imagine en dehors ou au delà de ce monde reste dans ce monde. Ce qui crée désormais un malaise vis à vis de la notion de récit. On voudrait écrire un récit, raconter quelque chose qui va au dehors ou au delà du « je » qui l’écrit, mais ça ne fonctionne plus, on sait désormais que ce récit reste lié à ce petit « je ». Le récit ne transcendera pas le « je ». En tous cas pour l’auteur ça ne fonctionne plus, voilà une conclusion.
Que penser alors d’un texte qui s’écrirait dans l’immanence. C’est à dire au fil de l’eau. C’est à dire à coup de fragments sans que ceux-ci ne soient orientés vers une même idée, c’est à dire encore un but qui les fédérerait en pensée en amont. Des bribes de textes décousues. En apparence un hasard. Ce serait prendre le problème en sens inverse par la croyance dans le fait que tout est relié déjà comme un grand livre , et ce même si nous ne sommes pas toujours en mesure de discerner ni couverture ni titre ni reliure.
Il semble désormais que peindre comme écrire dans un premier temps réclament une disponibilité, une spontanéité propre à l’immanence mais qu’au fur et à mesure qu’on évolue, la satisfaction diminue, le résultat ne cesse jamais d’évoquer un manque, quelque chose semble nous échapper. La volonté de contrôle alors prend le pas ( le fameux « je » ) et celui ci rêve de transcender ce résultat afin de se voir- dans ce miroir- autre- plus ceci ou cela, ou encore moins ceci ou cela- ce qui revient au même. Cette quête de transcendance n’est-elle pas illusoire puisque on ne cesse de retomber toujours sur le « pot aux roses » – Une crucifixion rien de moins. Cette exigence de vouloir être un autre que ce que l’on est. Mais de quoi rêve t’on sinon de ce semblable augmenté – d’une pure monstruosité ( on appelle cela progresser, s’améliorer) Mais par rapport à qui à quoi ? Il y a donc une nécessité de modèle à un moment ou un autre pour se comparer, pour essayer de mesurer (se mesurer au Minotaure aller si vous voulez. )
Tout cela au bout du compte est stupide et ne vaut que dans un cadre très étroit où les mots clefs sont « la reconnaissance », « la notoriété », l’acceptation par le groupe ( experts et pairs ) ; c’est ce que l’on appelle « être du monde »
Cette idée d’être du monde n’est pas non plus satisfaisante, les joies et les peines que l’on y trouve nous ramènent sans cesse à un manque, à notre petitesse ce qui est logique puisque le corollaire est la déception d’une grandeur fantasmée qui elle aussi ne cesse de nous échapper.
La position juste est d’oublier les quatre points cardinaux, toute notion de mesure, règle ou d’orientation. Il convient d’accepter une désorientation totale pour saisir qu’on ne peut plus faire autrement que de s’appuyer que sur ses sens, sur sa propre intuition, et les choix qui en découlent. Sur l’oubli du savoir, des techniques de l’habileté comme des calculs. On ne peut que recréer tout seul ce qui pour soi est désormais le haut et le bas, l’ici et l’ailleurs, l’horizon. Ce qu’on découvre ainsi n’est pas communicable de façon directe, il ne convient pas d’en parler car quiconque n’a pas emprunté ce cheminement ne le comprendra pas.
Etre du monde n’a jamais eu d’intérêt. Etre avec toi était plus attirant. Etre avec toi, n’est-ce pas la quête d’un graal qui soudain nous adoube chevalier chevaleresque. Encore qu’il faille un temps pour savoir qui tu es, pour saisir la présence d’un tout-autre que moi. Que ce tout autre est une nécessité aussi. Car c’est par cette connaissance de ce tout autre qu’on peut faire imploser la notion du même en soi, et toute velléité de vouloir ressembler à. Accepter le tout autre à l’extérieur comme à l’intérieur puis réduire en poudre ces deux mots.
En peinture échapper au déjà peint comme au déjà vu demande une gymnastique extra ordinaire, entre destruction et construction dans ce mouvement on apprend quelque chose de soi et du monde c’est qu’il est une seule et même chose, qui sans cesse se dérobe à la pensée rationnelle. C’est par le geste qu’on le touche et qu’il ou elle nous touche selon qu’on parle du tableau ou de la toile. C’est par le rythme, la répétition des gestes, des positions du corps, son déplacement – avancer reculer – face au support dans un espace donné qu’on appréhende ce qu’il est simple de nommer le mystère. Mais c’est l’être, ce petit mot, cet auxiliaire souvent invisible tellement on l’emploie qu’on ne le voit plus .
En ce qui concerne l’écriture le dégout de relire pour « améliorer » n’est toujours pas apaisé. Cela vient certainement de l’obstination de justesse qui vient de la peinture. De l’état d’esprit avant tout et dont tout part plutôt que d’un savoir faire pour faire du beau, de l’illusion.
Chaque texte est une flèche décochée non pour atteindre une cible, un but , mais pour parvenir à entendre le son juste de la corde lâchée enfin comme il se doit.
Le doute subsiste, il est nécessaire. Le doute comme l’insatisfaction. C’est à dire le regret des certitudes parfois, la nostalgie des certitudes.
Ensuite et ça me travaille depuis un moment, une envie d’agir les textes comme une exposition agit la peinture. J’en reviens à nouveau à la lecture à haute voix et encore une fois à peser le pour et le contre tant que l’intention n’est pas claire, lumineuse. Que ce ne soit surtout pas une option nouvelle pour me mettre en avant alors que je fais bien tout pour rester tout au fond à l’arrière, à tenter de m’effacer surtout.
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