Pêcher par la peinture

Cette cruauté enfantine que nous portons naturellement en nous , avant la perception du « bien et du mal » et qu’on appelle « l’innocence » tant convoitée par les vieilles et vieux salauds nostalgiques et fachos . C’est celle ci qui m’accompagnait durant mes longues journées de pèche.


Ce n’était rien alors de retirer l’hameçon de la mâchoire d’un poisson, de couper un ver de terre en deux, ou de voler des bonbons à l’étalage de l’épicière du coin.
Un jour tout cela s’est transmuté en « péché » sous la pression d’une morale collective. J’ai mis longtemps à me sortir de cette immense confusion. Ce n’est pas tous les jours rigolos de devenir poisson après avoir été pécheur. Ça m’a largement arraché la gueule et déchiré en deux.


Et puis il y a eut la peinture, et elle m’a permis ou plutôt je me suis autorisé au début et grâce à celle ci à revenir au chaos primordial. Devenir un pécheur dans le chaos en quelque sorte


Le chaos c’est ce lieu ou tout se mélange naturellement, ou tout est mélangé par nature, c’est l’indéterminé magistral. Le chaos c’est l’égout de l’univers, notre ignorance en somme.

Alors la nécessité de sens advient soudain et au travers de celle-ci une façon personnelle de ranger, d’ordonner par importance les lignes, les masses, les couleurs, symboles de mes pensées contradictoires, de mes rêves et de mes cauchemars.


Il y a plusieurs étages dans la découverte de la conscience. Et on saute de l’un à l’autre comme un magasinier fêlé qui chercherait à vérifier tout le temps en recomptant s’il ne s’est pas trompé dans son inventaire.


Alors le hasard et l’étrange entre en jeu.

Ce que l’on appelle désormais les synchronicités, mais il faut bien faire attention de ne pas transformer cela en martingale. Vouloir être maître des choses en matière de hasard, est bien hasardeux.

Mais c’est un chemin et tous les chemins mènent par hasard, par fatigue, par maladie, et parfois aussi par chance, au lâcher prise. C’est à dire non pas à une sinécure, une villégiature pépère, mais à un effondrement total et à une mise à jour carabinée. Le grand manitou, le grand soi, te remet sur tes rails que tu le veuilles ou pas. C’est plus douloureux pour rien si tu résistes voilà tout. Sinon c’est du travail c’est aussi simple que ça.

Il y a un rapport et celui ci est forcément sexuel pendant que nous y sommes entre la peinture et la pêche. Vouloir attraper un sein, une chatte, un cul, une bite ou anus comme un nuage, ou un reflet dans l’eau tout cela purs produits de notre conscience en chemin avec sa maladresse toute boueuse, encombrée de tous les dépôts les sédiments que le petit moi dépose dans son lit.

Un fois la maman putain dézinguée et l’ogre papa zigouillé quand les deux sont bien brûlés et leurs cendres enterrées, on y voit un peu plus clair. C’est à dire cette solitude pas inébranlable car il arrive que la masturbation prenne encore le pas sur l’ouvert. Se branler dans les concepts finit par tuer le désir. Mais c’est voulu encore, c’est un désir faux il y en a encore d’autres derrière, poupées russes…

Enfin quand on n’a plus rien d’autre que soi à abattre on finit par découvrir ce qui est putrescible et ce qui ne peut jamais l’être.