Dessin d’enfant sur le thème des masques. Photographie Patrick Blanchon
Un lien commun entre Gilles Deleuze et l’art tel que je le conçois c’est d’extérioriser la pensée, ne pas la laisser enfermée à l’intérieur de soi mais créer en action. Quand il se produisait en conférence Deleuze n’avait pas de note, il parlait et de cette parole parfois hésitante, bégayante , les concepts se dessinaient peu à peu.
En poésie, en écriture, aussi il s’agit de passer à l’acte d’écrire, de coucher sur le papier les choses comme elles viennent, les regarder s’articuler au début de façon maladroite en apparence , mais de cette maladresse, trouver l’adresse justement. Non pas en » arrangeant » les choses mais en s’arrangeant soi de pouvoir les saisir en se débarrassant de la notion de « cliché »
en dessin aussi commencer par un trait un point n’importe où sur la feuille et voir comment s’articule ceux ci, le cheminement et surtout être se mobiliser pour être surpris par ce que ça donne, rester « éveillé » à l’arrivée des surprises nécessite un œil débarrassé. laisser l’inconscient s’offrir peu à peu consciemment
C’est de cette spontanéité, de cette liberté aussi et par celles ci que le silence se fraie un chemin peu à peu, que le silence se laisse entendre ou voir les deux. Ce silence se manifeste souvent par l’inédit que recèle la banalité lorsqu’on pose un regard « neuf » sur celle ci mais le neuf c’est l’éternel, pas l’éphémère de la mode. Ce n’est jamais dans la quête de l’extraordinaire fantasmé.
Partir de choses concrètes pour toucher à l’abstraction mathématique du monde est une jouissance et non une souffrance.
Cependant souffrir pour parvenir à la conclusion que ce n’est pas la bonne manière. Les gens qui créent en disant que c’est grâce à la souffrance se trompent eux mêmes en ne comprenant pas le processus.
C’est comme un ressort la créativité, compresser en soi, s’enfoncer dans quelque chose profondément intimement, jusqu’à ce que ce « quelque chose » par la pression ait envie de s’extraire de s’enfuir de se dégager et de s’épanouir.
Sans doute que la souffrance aussi est directement liée à une notion de contrôle. vouloir contrôler ou s’approprier l’acte créateur pose beaucoup de difficultés jusqu’au moment où l’on accepte de n’être qu’un moyen, un passage par lequel celui ci nous traverse.
Dans notre époque la notion de propriété, comme de célébrité gênent beaucoup à l’ouverture de ce passage pour bon nombre de créateurs. C’est de la que vient la souffrance, pas du fait de créer.
l’amour teinte la démarche. Si tu as reçu beaucoup d’amour dans ton enfance, tu as confiance en toi, et tu n’as pas à passer par tant de difficultés. tu crées plus vite car tu es plus ouvert le passage n’est pas obstrué par les ressentiments, les rancœurs, c’est un avantage.
Les inconvénients de ceci c’est que tu es parfois moins riche d’expériences venant de l’ombre. Tu manques à un certain moment d’équilibre dans les notions de « valeurs, et de contraste » et donc de profondeur.
Si tu penses n’avoir pas reçu d’amour, tu te trompes sur ce que représente l’amour et rien de grave à cela mais cela nécessite de remonter les rivières pour aller pondre comme le font certains poissons.
La créativité et l’amour ne font qu’un. Nous baignons continuellement dans cet créativité et cet amour. Sans doute faut il du recul pour s’en rendre compte. Et comment trouver le recul nécessaire ? En s’oubliant, en faisant confiance à la parole qui sort de la bouche de l’enfant, à la main qui écrit et peint , en étant passage.
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