96. Notule 96

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Ecrire aussi est une initiation. Comme crier ou prêcher dans le désert. Il faut en passer par là probablement, c’est à dire faire le tour complet d’une montagne plutôt que d’imaginer en atteindre le sommet. Même si maintes fois l’obsession d’un sommet à atteindre nous assaille.

Abandonner quelque chose à chaque tour de piste. Comme l’auguste Auguste qui chute en déclenchant le rire et les observations automatiques de Monsieur Loyal.

Et une fois les rotations accomplies ne conserver que l’idée d’un cercle et d’une absence qui dessine ce cercle. Et dont la perfection parfaite ne tient qu’à la perfection de cette absence.

Et ce divertissement dans lequel on s’engouffre volontiers par ignorance obligée. Etre l’obligé d’une ignorance, et constater l’étendue d’une dette qu’on ne peut rembourser. Une dette qui ne demande d’ailleurs pas à être remboursée.

Ce divertissement du savoir, de la technique, des milles et unes stratégies et astuces que l’on place comme des petits cailloux pour ne pas s’oublier en chemin jusqu’à parvenir au dégout salvateur enfin.

Enfin le dégout de l’artifice, vous voyez bien.

On le renifle à cent mètres et les yeux clos, c’est encore une étape à franchir à n’en pas douter.

La compassion n’est pas bien loin. Ce qui ne veut pas dire new-age, ni gourou, ni ascendant, à moins de vouloir encore explorer la descente et la montée jusqu’à la panne d’ascenseur.

La compassion s’en fout royalement puisqu’elle sait qu’à terme elle gagnera. Qu’il n’y a pas d’autre possibilité de choix pour arrêter de crier comme de prêcher et de s’inventer sans relâche des déserts.

De la compassion pour soi-même par ricochet. Un présent qu’on n’espérait même plus tant la difficulté de recevoir avait été engloutie par l’ivresse du don mal adressé.

L’écriture est aussi proche de la danse soufie, elle nous enseigne par étapes successives tout ce qui ne fonctionne pas, tout ce qui est mensonge, illusion, à coté de la plaque. L’écriture est une maitresse implacable qui nous amène à une vérité tout aussi implacable: Ce besoin essentiel du désert et du silence quand, au bout du compte les cris, les hurlements, pas plus que les prêches n’ont plus aucune raison d’être sinon de nous emporter vers l’égarement final.

L’égarement de la fin, où ne subsiste rien pour s’accrocher, pour se raccrocher tranquillement, comme un vêtement à un porte manteau.

Qui est ce qui tourne en rond ?

La naissance d’un trou noir c’est un peu la même chose. Tout ce qui se trouve à la périphérie est peu à peu englouti, aspiré, sucé par une force centrifuge et vient nourrir le tourbillon, le fait croître. Le trou noir acquiert d’autant plus de puissance, d’importance qu’il absorbe son environnement pour ne plus être qu’un trou magistral.

Mais un trou ça doit bien mener quelque part, un trou dans quoi d’abord ? Un trou dans ce que l’on pense vide n’est ce pas étonnant ? Un trou dans l’espace, un trou dans les pensées n’est ce pas un peu la même chose ? Ces pensées qui finissent à force de tourner en rond à la périphérie d’un vide central finissent par s’y engouffrer pour ressortir autre quelque part dans l’oubli.

Qu’est ce qui tourne ainsi en rond dans certains points du cosmos et dans nos têtes ? Sans doute n’est ce que la face cachée de nombreuses germinations invisibles de prime abord et qu’on appelle l’oubli. Un oubli qui peu à peu nous ramènerait au familier. Pas un familier familiale oh non un familier de tout temps confondus Un familier éternel qui rendrait alors le familier profane à la limite de la caducité. Heureusement que la compassion est l’étincelle qui jaillit de l’autre coté des trous de ver. Il ne peut en être autrement. C’est avec une nouvelle passion que la danse reprend et que l’on tourne à nouveau en rond dans la joie et la paix enfin assemblées.

Illustration Cernunnos dieu Gaulois équivalent à Shiva

Daniélou voit dans ce dieu cornu et phallique une similitude avec Shiva également appelé Shringin, le cornu tous les deux épris de danse.

Tourner en rond

Tourner en rond autour du pot dit-on. Parce que forcément il faut bien une raison. Un pot ou quoique ce soit d’autre…Tourner en rond provoque une suspicion immédiate… On ne saurait tourner en rond pour rien ou plutôt sans tenir compte d’un centre.

Et si le centre était justement une absence ? La présence invisible d’une absence impossible à détecter sans la force centrifuge ou centripète ?

Tous ces mots que l’on place pour s’inventer un centre …

L’amour

Dieu

La passion

La joie

L’effroi

Les enfants

Peu importe le mot dans le fond de ce fond que l’on imagine que l’on pressent.

Aucun mot ne recouvrira le néant

la nuit.

Et puis il y a ceux qui tournent en rond sciemment.

Les maîtres… politiciens, putes et derviches.

Le chat qui avant de se coucher

le chien aussi

presque tous les animaux d’ailleurs et d’ici.

Et puis la terre autour du soleil

et le soleil aussi tourne autour d’un axe même si ça ne se voit pas à l’œil nu.